Traditions musicales vikings :
instruments et compositions
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La musique des peuples nordiques de l’ère viking était un phénomène culturel complexe et multiforme qui a profondément influencé la vie quotidienne, les rituels religieux et les campagnes militaires. Les Vikings, souvent perçus comme des guerriers et des navigateurs impitoyables, possédaient une riche culture musicale reflétant leur vision du monde, leurs croyances et leur organisation sociale. Les découvertes archéologiques, les sources littéraires et les études ethnographiques nous permettent de reconstituer l’univers sonore des peuples scandinaves des VIIIe-XIe siècles et de mettre en évidence l’importance de la musique dans leur vie. Les traditions musicales vikings comprenaient une variété d’instruments, allant de simples flûtes en os d’animaux à des instruments à cordes complexes, une riche culture du chant représentée par la poésie scaldique et les chants populaires, et une attitude particulière envers la musique comme moyen magique d’interaction avec les puissances supérieures.
2 Instruments de musique vikings
3 L’art des chansons vikings
4 Musique rituelle et cérémonielle
5 Interprétations modernes de la musique viking
6 L’influence de la musique viking sur la culture mondiale
7 Recherche et préservation du patrimoine musical viking
L’héritage historique de la musique viking
La musique jouait un rôle important dans la vie des peuples scandinaves à l’époque viking. Elle accompagnait divers aspects de leurs activités quotidiennes, fêtes, rituels religieux et événements militaires. Les Vikings utilisaient la musique non seulement pour se divertir, mais aussi comme moyen de transmission du savoir historique, de renforcement des liens communautaires et de pratiques religieuses.

Le rôle social de la musique dans la culture viking était multiple. La musique servait de moyen de communication entre les peuples et les puissances divines. Elle servait à transmettre l’expérience historique : les exploits des guerriers et les hauts faits des rois étaient immortalisés dans les chants des scaldes. La musique jouait un rôle organisateur : les chants rythmés des rameurs coordonnaient les mouvements des rames sur les navires, les chants de travail facilitaient le travail collectif. La musique renforçait également le sentiment d’appartenance à la communauté lors des fêtes et des jours fériés.
La reconstitution de la culture musicale viking s’appuie sur plusieurs types de sources. Les découvertes archéologiques comprennent des vestiges d’instruments de musique découverts lors de fouilles d’établissements et de sépultures vikings. Des sources écrites telles que les sagas, les Eddas et les scaldes contiennent des références aux traditions musicales et au rôle de la musique dans la société. Le folklore et les études ethnographiques des peuples scandinaves permettent de retracer la continuité des traditions musicales de l’époque viking à des époques ultérieures. Les sources visuelles – images sur des pierres, monuments runiques et objets domestiques – incluent parfois des scènes de musique, donnant une idée de la forme des instruments et de la manière d’en jouer.
Malgré les sources limitées, les chercheurs modernes ont pu reconstituer les principales caractéristiques de la culture musicale viking, notamment les types d’instruments utilisés, la diversité des genres des chansons et la signification de la musique dans différents contextes.
Instruments de musique vikings
Les instruments de musique vikings étaient variés et comprenaient des instruments à vent, à cordes et à percussion. Certains étaient propres à la culture scandinave, tandis que d’autres avaient des analogies chez divers peuples du monde.
Instruments à vent
Les instruments à vent vikings étaient une partie importante de leur culture musicale et étaient utilisés aussi bien dans la vie quotidienne que lors d’occasions spéciales.
Le cor (lur) est l’un des instruments à vent les plus caractéristiques de l’ère viking. Il était fabriqué à partir de corne d’animal (vache, taureau, chèvre) ou de métal. Les découvertes archéologiques de lurs varient en taille et en forme. L’instrument pouvait être droit ou courbé, et sa longueur variait de quelques dizaines de centimètres à un mètre, voire plus. Par exemple, un lur découvert au Danemark dans les années 1990 mesurait 78 à 79,5 cm de long, tandis que le spécimen provenant du célèbre navire funéraire d’Oseberg mesurait 106,5 cm.
Les fonctions du lur étaient variées. Dans la vie paisible, il pouvait être utilisé par les bergers pour appeler leur bétail ou signaler d’autres bergers. Dans les affaires militaires, le lur servait à signaler l’approche d’un ennemi, à rassembler les guerriers avant une bataille et à coordonner les actions au combat. Le lur pouvait également être utilisé lors des cérémonies religieuses et des fêtes.
Le son du lur dépendait de sa taille, de sa forme et de son matériau de fabrication. Les grands instruments produisaient des sons graves et bourdonnants, tandis que les petits produisaient des sons plus aigus et stridents. La tessiture était limitée à quelques notes, déterminée par les propriétés physiques de l’instrument.
La flûte était un instrument courant chez les Vikings, comme chez de nombreux autres peuples anciens. Les Scandinaves fabriquaient des flûtes à partir de divers matériaux, le plus souvent à partir d’os d’animaux (vaches, cerfs, moutons) ou de grands oiseaux. Le bois était également utilisé, bien que les flûtes en bois soient moins bien conservées dans les couches archéologiques.
La conception de la flûte était assez simple. Plusieurs trous, généralement de 15 à 30 cm de long, étaient pratiqués dans le tube. Le modèle de base comportait trois trous, ce qui permettait une gamme sonore limitée. Cependant, les archéologues ont découvert des exemplaires à sept trous, ce qui élargissait considérablement la gamme sonore de l’instrument.
La flûte était principalement utilisée pour le divertissement, mais pouvait également avoir d’autres fonctions : accompagner des danses, des rituels ou des récits. La technique de jeu consistait à diriger le flux d’air vers le bord tranchant du trou et à ajuster la hauteur du son grâce aux trous du corps.
La flûte de Pan viking était un instrument à vent particulier, de conception différente de la flûte de Pan européenne courante. Des découvertes archéologiques, dont un spécimen découvert à York, en Angleterre, datant du Xe siècle, permettent de reconstituer l’instrument.
Contrairement à la flûte de pan classique, composée de plusieurs tuyaux de différentes longueurs, la version scandinave était fabriquée dans une seule pièce de bois. Cinq trous de différentes profondeurs y étaient percés, chacun produisant une note spécifique lorsqu’il était soufflé. Le célèbre modèle de York permettait de produire les notes do dièse, ré, mi, la et si. La table d’harmonie était biseautée pour faciliter la prise en main et le jeu.
La flûte de Pan viking était probablement utilisée pour jouer des mélodies simples et accompagner des chants. Sa taille compacte la rendait pratique pour les voyages, et sa relative facilité de fabrication permettait à de nombreuses personnes d’en posséder une.
Le shalmei est un instrument qui ressemble à une flûte, mais dont la méthode de production sonore est fondamentalement différente. Pour en jouer, il fallait créer un puissant flux d’air qui faisait vibrer la languette de l’anche, générant ainsi le son. Ce processus exigeait un effort physique important et des compétences particulières.
On suppose que les Vikings auraient utilisé un sac en cuir spécial pour créer un flux d’air, transformant ainsi la chalemie en cornemuse. Dans ce cas, la chalemie est devenue le tuyau mélodique du premier prototype de la cornemuse, qui s’est ensuite répandu dans toute l’Europe.
Le son du shalmei était perçant et brillant, ce qui le rendait particulièrement efficace pour les performances en extérieur pendant les vacances et les cérémonies.
La munharpa (guimbarde scandinave) était un petit instrument appartenant à la famille des guimbardes, l’un des plus anciens instruments de musique connus de l’humanité. On trouve des guimbardes dans diverses variantes dans de nombreux pays du monde sous différents noms : doromb en Hongrie, murchunga au Népal, dan moi au Vietnam, etc.
Le munharpa était fait de métal (fer, bronze) ou d’os et avait la forme d’un fer à cheval avec une fine languette en son centre. Pour jouer, on pressait l’instrument contre les dents, en laissant un léger espace entre elles, et on frappait la langue avec un doigt. La vibration était transmise à travers les dents et le crâne, et la cavité buccale servait de résonateur. En modifiant la forme de la cavité buccale, le musicien pouvait modifier le timbre et les nuances du son.
Le son du munharpa était particulier : bourdonnant, vibrant, avec une riche composition harmonique. Cet instrument était utilisé en solo et avait peut-être une signification rituelle associée aux états de conscience modifiés et à la communication avec le monde spirituel.
Instruments à cordes
Les instruments à cordes occupaient une place particulière dans la culture musicale viking, accompagnant les chants scaldes et créant une atmosphère lors des fêtes et des célébrations.
La lyre (kratt, talharpa) est un instrument à cordes pincées très répandu en Europe du Nord au début du Moyen Âge. La lyre viking était un petit instrument doté d’un corps en bois et de cordes tendues en tendons d’animaux. Le nombre de cordes variait de 5 à 7. Le corps était doté d’un résonateur pour amplifier le son.
La lyre était utilisée pour accompagner les chants, pour jouer en solo et peut-être pour l’enseignement de la musique. Les techniques de jeu incluaient le pincement des cordes ou l’utilisation d’un plectre en os ou en corne.
Les découvertes archéologiques de lyres de l’époque viking sont relativement rares en raison de la nature organique de la plupart des pièces de l’instrument. Cependant, les exemplaires et les images qui subsistent permettent de reconstituer leur structure et leur son.
Le gusli est un instrument à cordes pincées courant chez les peuples slaves, mais qui avait aussi des équivalents chez les Scandinaves. Les versions scandinaves du gusli étaient appelées kantele par les Finlandais et kannel par les Estoniens. Ces instruments possédaient une caisse de résonance plate en bois, de forme trapézoïdale ou ovale, avec des cordes parallèles en tendon animal ou en métal.
Le nombre de cordes pouvait varier de 5 à 6 dans les premiers modèles à 10 à 12 dans les versions ultérieures. Le gusli se jouait en plaçant l’instrument horizontalement sur les genoux ou une table, et en pinçant les cordes avec les doigts des deux mains.
Le gusli était utilisé pour accompagner les contes, les chants et les compositions instrumentales en solo. Son son doux et mélodieux était idéal pour les concerts de chambre en intérieur.
Instruments à percussion
Les instruments à percussion ont joué un rôle important dans la culture musicale viking, en particulier dans le contexte des pratiques rituelles et de la guerre.
Le tambour chamanique était un instrument de percussion composé d’un cerclage en bois recouvert d’une membrane en peau animale. Sa fabrication était laborieuse et comportait plusieurs étapes. Tout d’abord, le cerclage était préparé : des morceaux de bois étaient trempés dans l’eau pendant environ une semaine pour les assouplir. Ensuite, le bois ramolli était roulé en anneau et maintenu au-dessus d’un feu pour en fixer la forme. Les bords étaient reliés par des pinces métalliques ou des lanières de cuir.
Une membrane fabriquée à partir de la peau d’un animal – cheval, chèvre, taureau, ours ou autre – était tendue sur le cadre fini. Elle était souvent décorée de dessins symboliques à signification religieuse ou d’amulettes.
La taille du tambour influençait la nature du son : les petits tambours d’environ 30 cm de diamètre produisaient un son aigu et résonnant, tandis que les instruments plus grands produisaient un son riche et profond. On jouait du tambour soit en frappant la membrane à la main, soit avec un maillet spécial. Ce dernier était souvent recouvert de fourrure pour ne pas endommager la membrane lors de la frappe.
L’humidité ambiante pouvait affecter la tension de la membrane et, par conséquent, le son de l’instrument. Si la membrane était déformée par l’humidité, le son se dégradait. Dans ce cas, le tambourin était séché au feu afin que la membrane se tende à nouveau fermement sur le cadre.
Le tambour chamanique était principalement utilisé lors de rituels religieux. Les battements rythmiques aidaient le prêtre ou le chaman à entrer en transe, nécessaire à la communication avec les esprits et les dieux. Les tambours pouvaient également être utilisés lors d’opérations militaires pour transmettre des signaux et intimider l’ennemi.
Les Vikings utilisaient divers types de tambours, en plus des tambours chamaniques. Contrairement aux tambours plats, les tambours pouvaient être de forme cylindrique, avec des membranes tendues aux deux extrémités d’un cylindre de bois creux.
La technique de fabrication était similaire à celle des tambourins, mais la fabrication du corps cylindrique exigeait une plus grande habileté. Les membranes étaient fixées au corps à l’aide de lanières de cuir ou de cordes, qui servaient également à ajuster la tension et, par conséquent, la hauteur du son.
Les tambours étaient utilisés dans une variété de contextes : pour donner le rythme aux danses, pour accompagner les chants, dans les campagnes militaires pour coordonner les actions des guerriers et dans les cérémonies religieuses.
Les instruments à percussion – crécelles, cloches, hochets – faisaient également partie de l’instrumentation musicale des Vikings. Ces instruments simples étaient fabriqués à partir de matériaux variés – bois, métal, os – et pouvaient avoir une fonction purement musicale ou magique.
Les hochets étaient fabriqués en bois ou en os, créant un motif qui produisait un craquement ou un coup lorsqu’on les secouait ou les frappait. Les cloches étaient coulées en bronze ou en fer et suspendues à des lanières de cuir ou à des cordes. Les hochets étaient fabriqués à partir de récipients creux contenant de petites pierres ou des graines.
Les instruments à percussion étaient utilisés pour créer un accompagnement rythmique aux chants et aux danses, ainsi que dans les pratiques magiques visant à éloigner les mauvais esprits. Le tintement du métal et le son aigu des hochets étaient censés détruire la magie néfaste et protéger des dangers surnaturels.
L’art des chansons vikings
La tradition du chant jouait un rôle central dans la culture musicale des Vikings. Les chants accompagnaient divers aspects de la vie des peuples du Nord, du travail quotidien aux campagnes militaires et aux cérémonies religieuses.
Poésie scaldique
Les scaldes étaient des poètes-chanteurs professionnels qui occupaient une place particulière dans la société viking. Le mot « scalde » vient du vieux norrois « skáld », qui signifie « poète ». Les scaldes vivaient souvent à la cour des konungs (souverains) et des jarls (nobles guerriers), où ils créaient et interprétaient des poèmes glorifiant les exploits du souverain et de sa suite.
Selon la mythologie scandinave, le don poétique des scaldes était d’origine divine. Les Vikings croyaient que les scaldes acquéraient leurs dons en buvant l’hydromel poétique de Kvasir. Selon le mythe, Kvasir était l’être le plus sage, créé à partir de la salive des dieux Ases et Vanes. Après sa mort, une boisson fut créée à partir de son sang mélangé à de l’hydromel, ce qui lui conféra le talent poétique. Ce mythe expliquait pourquoi certains étaient capables d’écrire de la poésie et de chanter avec aisance, tandis que d’autres en étaient incapables.
La poésie scaldique se distinguait par une métrique complexe et un système d’allégories (kennings). Les kennings étaient des substitutions métaphoriques de mots ordinaires, par exemple « hippocampe » au lieu de « navire », « nourrisseur de corbeaux » au lieu de « guerrier ». Un système d’images aussi complexe exigeait des auditeurs une bonne connaissance de la mythologie et des traditions.
Les scaldes exécutaient leurs œuvres principalement sans accompagnement musical, en récitatif. Ils ne chantaient que les événements dont ils avaient été témoins, ce qui conférait à leur poésie l’authenticité d’une source historique. Ainsi, la poésie orale des scaldes servait à consigner les événements historiques et à les transmettre aux générations suivantes.
Les principaux genres de poésie scaldique étaient :
- Drapa est un chant solennel de louange en l’honneur d’un dirigeant ou d’un héros
- Floccus est une œuvre poétique moins formelle et sans refrain.
- Les nidas sont des poèmes satiriques, souvent offensants.
- Mansyong - poésie d’amour
La tradition scaldique a prospéré aux IXe et XIe siècles et s’est progressivement éteinte avec la christianisation de la Scandinavie, bien que des éléments individuels aient survécu dans la poésie islandaise jusqu’au XIIIe siècle.
Chansons folkloriques vikings
En plus de la poésie scaldique professionnelle, la culture viking possédait une riche tradition de chants folkloriques interprétés dans la vie quotidienne.
Les chants de travail accompagnaient divers types de travaux et contribuaient à organiser les efforts collectifs. Les chants des rameurs sur les navires vikings étaient particulièrement importants. Les chants rythmés permettaient de synchroniser les mouvements des rames, essentiels à la manœuvrabilité du navire. Des chants similaires existaient pour d’autres types de travaux collectifs : récolte, pêche, chasse.
Les chants de table étaient interprétés lors des fêtes et des jours fériés. Les guerriers chantaient leurs exploits militaires et leurs succès en campagne, et racontaient des récits de voyages vers des contrées lointaines. Ces chants renforçaient les liens communautaires et soutenaient l’esprit combatif de l’escouade.
Les chansons du quotidien accompagnaient la vie quotidienne des Vikings : berceuses, chansons pour jeux d’enfants, chansons d’amour. Transmises de génération en génération, elles reflétaient la vision du monde et les valeurs des peuples scandinaves.
Malheureusement, presque aucune chanson folklorique viking authentique n’a survécu dans sa forme originale. L’une des rares exceptions est la composition « Drømde mik en drøm i nat » (« La nuit dernière, j’ai fait un rêve »). L’enregistrement de cette chanson remonte au XIVe siècle, mais les chercheurs pensent qu’elle est bien plus ancienne. Elle est écrite en vieux norrois et figure dans le manuscrit Codex Runicus.
Les paroles de la chanson qui nous sont parvenues sont extrêmement laconiques : « Drømde mik en drøm i nat um silki ok ærlik pæl ». Il existe plusieurs traductions de ce texte :
- «La nuit dernière, j’ai rêvé de soie et de belle fourrure.»
- «La nuit dernière, j’ai rêvé de soie et de tissus coûteux.»
- «La nuit dernière, j’ai rêvé de justice et d’équité.»
Outre les paroles, la notation musicale de la mélodie a été préservée, faisant de « Drømde mik en drøm i nat » une source unique pour reconstituer le son de la musique norroise ancienne. Les interprètes modernes proposent diverses interprétations de cette chanson basées sur la notation conservée.
Musique rituelle et cérémonielle
La musique jouait un rôle important dans la vie religieuse des Vikings, accompagnant diverses cérémonies et rituels associés au culte des dieux et des ancêtres scandinaves.
Le rôle de la musique dans les cérémonies religieuses
À l’époque viking, les Vikings croyaient à la nature magique de la musique et du chant. Ils croyaient que les sons musicaux, tels des sorts, pouvaient influencer le monde environnant, invoquer les dieux et les esprits et chasser les forces du mal.
Les cérémonies religieuses vikings comportaient souvent un accompagnement musical. Lors des sacrifices aux dieux, des fêtes saisonnières (par exemple, Yule (solstice d’hiver) ou du solstice d’été (solstice d’été), des rites funéraires et autres rituels, on entendait des chants et de la musique.
Les chants adressés aux dieux glorifiaient leurs exploits et leur puissance. Ils servaient de moyen de communication entre les hommes et les forces divines. Les chants dédiés à Odin, dieu suprême du panthéon scandinave, protecteur de la poésie et de la magie, revêtaient une importance particulière.
Le sens magique de la musique
Les Vikings attribuaient des propriétés magiques à la musique et au chant. Certaines mélodies et certains rythmes étaient censés guérir les maladies, offrir une protection au combat, attirer la chance ou jeter des malédictions sur les ennemis.
Le galdr est un type particulier de chant associé aux sorts runiques. Son exécution impliquait un chant ou une récitation avec une intonation et un rythme particuliers. On croyait qu’un galdr correctement exécuté activait le pouvoir magique des runes et permettait d’influencer la réalité.
Le seidr est une forme de pratique chamanique souvent accompagnée de percussions rythmées et de chants monotones. Ces sons rythmés aidaient le pratiquant du seidr (völva ou chaman) à entrer en transe et à voyager entre les mondes pour acquérir des connaissances ou influencer les événements.
Les instruments de percussion, notamment les tambours chamaniques, jouaient un rôle important dans ces rituels. Les rythmes créaient un fond sonore particulier qui contribuait à modifier l’état de conscience des participants. Le rythme monotone du tambour, les sons répétitifs des hochets et des cloches entraînaient un état de transe et renforçaient la perception de l’espace et du temps sacrés.
Interprétations modernes de la musique viking
L’intérêt pour la musique de l’époque viking ne faiblit pas dans le monde moderne. Les découvertes archéologiques d’instruments de musique, l’étude des sources littéraires et le matériel ethnographique nous permettent de reconstituer le son de la musique scandinave ancienne et de l’adapter au public contemporain.
Reconstitutions archéologiques
Les artisans modernes fabriquent des répliques d’instruments de musique vikings à partir de découvertes archéologiques. Ces reconstitutions nous permettent de nous rapprocher du son authentique de la musique scandinave ancienne.
Le processus de reconstruction comprend plusieurs étapes :
- Étude des instruments originaux survivants ou de leurs fragments
- Une analyse des technologies et des matériaux disponibles à l’époque viking
- Réaliser une réplique en utilisant des méthodes et des matériaux traditionnels
- Étude expérimentale des capacités sonores de l’instrument
Les musiciens spécialisés dans la reconstitution historique étudient les anciennes manières de jouer de ces instruments à partir d’images, de descriptions littéraires et de parallèles ethnographiques. Il en résulte une musique aussi fidèle que possible à l’histoire, même si la restitution intégrale du son authentique reste impossible en raison du manque de sources.
Groupes de musique modernes
Il existe actuellement de nombreux groupes musicaux qui s’inspirent de la culture viking et créent des compositions dans un style proche du son historique ou adaptent des motifs scandinaves pour un public moderne.
Wardruna est un projet musical norvégien fondé en 2003. Le groupe utilise des instruments scandinaves anciens reconstitués et s’inspire de la mythologie scandinave et de l’alphabet runique. Leur musique a acquis une grande renommée grâce à son utilisation dans la bande originale de la série télévisée Vikings.
Heilung est un collectif musical dont les membres viennent du Danemark, d’Allemagne et de Norvège. Ils décrivent leur style comme « une histoire enrichie du haut Moyen Âge de l’Europe du Nord ». Le groupe utilise des instruments anciens reconstitués, des textes en langues anciennes et des éléments de pratiques chamaniques.
Danheim est un projet musical danois qui crée une musique atmosphérique inspirée de l’époque viking. Ses compositions utilisent à la fois des instruments anciens reconstitués et des éléments électroniques modernes.
Les thèmes de la mythologie viking et scandinave sont devenus populaires dans divers genres musicaux modernes, notamment le métal. Dès les années 1970, des éléments de la mythologie scandinave apparaissent dans les œuvres de groupes tels que Led Zeppelin et Black Sabbath.
Dans les années 1980, le groupe de heavy metal américain Manowar a commencé à consacrer des albums entiers à la mythologie nordique. Leur style musical, caractérisé par un tempo moyen, une sonorité «visqueuse» et des chœurs, préfigurait l’émergence du «metal viking».
Le groupe suédois Heavy Load avec les chansons «Son of Northern Light» (1978) et «Stronger Than Evil» (1983) et le groupe américain Legend avec l’album «From the Fjords» (1979) sont considérés comme des pionniers de la musique métal à thème viking.
Dans les années 1990 et 2000, un sous-genre distinct du metal a émergé : le « metal viking », représenté par des groupes tels que Bathory, Enslaved, Amon Amarth, Týr et d’autres. Ces groupes s’inspirent de la mythologie scandinave, de récits historiques de l’ère viking et d’éléments de la musique traditionnelle scandinave.
L’influence de la musique viking sur la culture mondiale
Les traditions musicales vikings ont eu une influence significative sur le développement de la musique folklorique en Scandinavie et dans d’autres régions, et continuent d’inspirer les musiciens et compositeurs modernes.
Patrimoine de la musique folklorique scandinave
De nombreux éléments de la culture musicale viking ont été préservés dans la musique folklorique des pays scandinaves. Les instruments, les motifs mélodiques et rythmiques, ainsi que les techniques d’interprétation, ont évolué, tout en conservant un lien avec les traditions anciennes.
Les instruments folkloriques scandinaves modernes trouvent souvent leurs racines dans l’époque viking. Par exemple, la nyckelharpa suédoise (harpe à touches), instrument à cordes frottées doté d’un mécanisme de clavier, est une évolution d’instruments à cordes plus simples. Le hardingfele norvégien (violon harding), un type particulier de violon doté de cordes résonnantes supplémentaires, pourrait également être lié à d’anciennes traditions de cordes.
Des genres de chants tels que le stev norvégien (court chant improvisé) et le kullning suédois (technique particulière de chant de berger) pourraient trouver leurs racines dans la pratique musicale du vieux norrois. La tradition du chant runique en Finlande et en Carélie fait également écho aux chants magiques des Vikings.
Les mélodies et rythmes de danse courants dans la musique folklorique scandinave conservent parfois des éléments archaïques, remontant peut-être à l’époque viking. Par exemple, certaines polski (danses traditionnelles suédoises) présentent des structures rythmiques asymétriques qui pourraient refléter des traditions musicales anciennes.
Influence sur les genres musicaux modernes
La musique viking et la mythologie scandinave ont eu une influence significative sur diverses directions de la musique moderne.
La musique folk et le folk rock s’inspirent souvent de motifs et d’instruments scandinaves. Les groupes qui évoluent dans ces genres adaptent mélodies et instruments traditionnels à une sonorité moderne, créant ainsi un pont entre les formes musicales anciennes et modernes.
La musique métal , notamment les sous-genres viking metal et folk metal, exploite largement les thèmes vikings et les éléments de la musique scandinave. Ces groupes associent le son puissant des guitares électriques et de la batterie à des instruments et motifs traditionnels.
Le néofolk et le folk sombre incluent des reconstitutions de chants et de musiques rituelles anciens, souvent teintées de chamanisme et de mysticisme. Ces courants cherchent à recréer l’atmosphère des rituels et mystères anciens.
Les bandes originales des films et séries télévisées sur le thème des Vikings incluent souvent des éléments de musique nordique reconstituée. Ces œuvres permettent à un public plus large de se familiariser avec les traditions musicales vikings dans une interprétation moderne.
Recherche et préservation du patrimoine musical viking
Les chercheurs, musiciens et passionnés modernes déploient des efforts considérables pour rechercher, reconstruire et préserver l’héritage musical de l’ère viking.
Recherche scientifique
L’archéomusicologie, discipline interdisciplinaire qui étudie les instruments et les pratiques musicales du passé à partir des découvertes archéologiques, joue un rôle important dans l’étude de la musique viking. Les scientifiques analysent les instruments survivants, leurs fragments et leurs images afin de reconstituer leur structure, leurs méthodes de jeu et leur sonorité.
Les études philologiques des textes vieux norrois — sagas, eddas, poésie scaldique — révèlent des références à des pratiques musicales, des instruments et des contextes d’interprétation. L’analyse des métriques de la poésie scaldique permet de comprendre la structure rythmique de la musique vieux norrois.
Les études ethnomusicologiques sur la musique traditionnelle des pays scandinaves révèlent des éléments potentiellement préservés de l’époque viking. L’analyse comparative des traditions musicales de divers peuples nordiques permet de reconstituer les traits communs des pratiques musicales anciennes.
Archéologie expérimentale et reconstruction
Des experts reconstitueurs créent des répliques d’instruments de musique vikings en utilisant des technologies et des matériaux traditionnels. Ces expériences permettent de mieux comprendre les capacités sonores des instruments anciens et les techniques utilisées pour les jouer.
Les musiciens-reconstituteurs expérimentent différentes méthodes d’interprétation en s’appuyant sur des sources historiques et des parallèles ethnographiques. Ils s’efforcent de recréer le son authentique de la musique nordique ancienne, tout en reconnaissant le caractère hypothétique de telles reconstitutions.
Les festivals de reconstitution historique et les événements musicaux thématiques promeuvent la musique viking et favorisent les échanges d’expériences entre chercheurs et interprètes. Ces événements permettent au grand public de se familiariser avec la musique reconstituée de l’époque viking et de contribuer à la préservation de ce patrimoine culturel.
Les traditions musicales vikings constituent un phénomène culturel riche et diversifié, reflétant la vision du monde, les croyances et le mode de vie des peuples nordiques du haut Moyen Âge. Malgré les limites des sources historiques, les recherches et les reconstitutions modernes nous permettent de mieux comprendre l’univers sonore des Scandinaves antiques.
La musique accompagnait les Vikings dans tous les aspects de leur vie, des activités quotidiennes aux rituels religieux et aux campagnes militaires. Une variété d’instruments de musique – vent, cordes, percussions – et une riche tradition de chants ont créé une culture musicale unique, dont des éléments ont été préservés dans le folklore des pays scandinaves et continuent d’inspirer les musiciens modernes.
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