Les mystères des éruptions volcaniques
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Derrière chaque spectaculaire spectacle de feu, de cendres et de roches en fusion se cache un système complexe de processus qui ont façonné notre monde pendant des millions d’années. Ces géants géologiques créent de nouvelles terres et montagnes, influencent le climat de la planète, la composition atmosphérique et l’évolution de la vie.
2 Mécanismes d’éruption : des effusions silencieuses aux explosions catastrophiques
3 Coulées pyroclastiques : avalanches de feu mortelles
4 Foudre volcanique : orages électriques dans les nuages de cendres
5 Émissions de gaz : des participants invisibles aux processus volcaniques
6 Indice d’explosivité volcanique : échelle de destruction
7 Supervolcans : les géants endormis de la planète
8 Surveillance et prévision des éruptions
9 Effets climatiques : quand les volcans modifient le temps
10 Dangers cachés : lahars et tsunamis
11 La ceinture de feu du Pacifique : une usine à catastrophes mondiale
12 Volcans en dehors de la ceinture de feu
Anatomie de l’appareil volcanique
Chaque volcan est une fenêtre ouverte sur l’intérieur de la Terre – un conduit reliant la surface de la planète à des chambres magmatiques profondes de plusieurs dizaines de kilomètres. La recherche moderne révèle l’architecture complexe des systèmes volcaniques, qui détermine la nature et la puissance des éruptions.
Les systèmes magmatiques présentent une structure multicouche. Les réservoirs profonds se situent dans la croûte inférieure ou le manteau supérieur, à des profondeurs de 27 à 33 kilomètres. Ces vastes réservoirs alimentent des chambres périphériques plus petites, situées à 1,5 à 2 kilomètres de profondeur. C’est à partir de ces réservoirs peu profonds que se produisent la plupart des éruptions.
Le transport du magma entre les niveaux s’effectue par un système de failles digues verticales formées par la fracturation hydraulique des roches encaissantes. La section transversale d’un tel conduit à une profondeur de 15 kilomètres peut atteindre 13,7 kilomètres carrés. La remontée du magma est contrôlée par des conditions géomécaniques : l’extension horizontale produit des failles normales, tandis que la compression produit des failles inverses.
Les chambres magmatiques périphériques jouent un rôle clé dans la préparation d’une éruption. Le magma s’y accumule, dégaze et réchauffe les eaux météoriques, formant ainsi des réservoirs de vapeur et de gaz à haute pression. Lorsque la pression du gaz dépasse le poids des roches sus-jacentes, une explosion hydrothermale se produit, libérant le conduit volcanique et initiant la phase de cendres, de vapeur et de gaz de l’éruption.
Mécanismes d’éruption : des effusions silencieuses aux explosions catastrophiques
La nature de l’activité volcanique est déterminée par de nombreux facteurs, parmi lesquels la composition du magma, la teneur en gaz, la profondeur de la chambre magmatique et l’interaction avec l’eau jouent un rôle décisif.
Éruptions effusives
Les éruptions effusives se caractérisent par un écoulement silencieux de lave à la surface. Ce type d’activité est typique des magmas basaltiques à faible viscosité et faible teneur en gaz dissous. Les laves basaltiques peuvent parcourir jusqu’à 50 kilomètres du volcan, mais leur parcours est généralement de 5 à 10 kilomètres. La vitesse des coulées de lave est relativement lente, ce qui permet l’évacuation de la population, mais entraîne la destruction complète des bâtiments et des infrastructures.
Les éruptions hawaïennes sont un exemple classique d’activité effusive. Du magma, dont la température atteint 1 000 à 1 200 °C, s’écoule librement des fissures, formant d’impressionnantes fontaines de lave atteignant plusieurs centaines de mètres de haut. Une faible teneur en silice (moins de 50 %) et une température élevée assurent la fluidité de la fonte.
Éruptions explosives
Les éruptions explosives se produisent lorsque le magma contient de grandes quantités de gaz dissous, principalement de la vapeur d’eau, du dioxyde de carbone et du dioxyde de soufre. À mesure que le magma monte, la pression diminue, les gaz se libèrent et se dilatent, créant une pression colossale qui fragmente la masse fondue en minuscules fragments.
La viscosité du magma joue un rôle crucial dans l’explosivité d’une éruption. Les magmas andésitiques et rhyolitiques à forte teneur en silice (60 à 75 %) présentent une viscosité nettement supérieure à celle des basaltes. Ceci inhibe la libération libre des gaz, entraînant une accumulation de pression et une libération d’énergie catastrophique.
La fragmentation du magma se produit lorsque la différence de pression entre les bulles de gaz et le matériau fondu atteint le point de rupture. À ce stade, le magma se désintègre en de nombreuses particules de tailles variées – des cendres aux gros blocs – qui sont éjectées dans l’atmosphère à grande vitesse.
Éruptions phréatomagmatiques
Un type particulier d’activité explosive se produit lorsque le magma interagit avec l’eau. Le contact entre la roche en fusion et les eaux souterraines ou de surface entraîne la production instantanée de vapeur à haute pression. Un exemple classique est l’éruption du volcan islandais Eyjafjallajökull en 2010, lorsque du magma a percé la calotte glaciaire.
Les éruptions sous-marines sont également qualifiées de phréatomagmatiques si le magma contient suffisamment de gaz. L’interaction avec l’eau de mer peut entraîner la formation de nouvelles îles, comme ce fut le cas lors de la formation de l’île Surtsey au large des côtes islandaises.
Coulées pyroclastiques : avalanches de feu mortelles
De tous les risques volcaniques, les coulées pyroclastiques sont à juste titre considérées comme les plus destructrices et les plus meurtrières. Depuis la nuit des temps, elles ont fait plus de 90 000 victimes, et la tragédie survenue en Martinique en 1902, où 30 000 habitants de Saint-Pierre ont péri, demeure l’une des pires catastrophes volcaniques.
Les coulées pyroclastiques sont des mélanges rapides de gaz volcaniques chauds, de cendres et de fragments rocheux. Leur température peut atteindre 1 000 °C et leur vitesse varie de 100 à 700 kilomètres par heure. Ces avalanches ardentes peuvent parcourir plus de 100 kilomètres depuis le volcan.
Les coulées pyroclastiques se forment de plusieurs manières. Le mécanisme le plus courant est l’effondrement de la colonne éruptive lors des éruptions pliniennes. Lorsque les matériaux éjectés ne parviennent pas à s’élever suffisamment en raison de leur densité ou de l’absence de courants convectifs, la colonne s’effondre et dévale les pentes du volcan sous l’effet de la gravité.
L’effondrement gravitationnel des dômes ou flèches de lave crée un autre type de coulée pyroclastique. Lorsque de la lave visqueuse s’accumule sur des pentes abruptes, un point critique d’instabilité est atteint et le massif tout entier s’effondre, se transformant en une avalanche de lave en fusion. C’est précisément le mécanisme à l’œuvre au volcan de la Soufrière Hills, à Montserrat, où 19 personnes ont péri en 1997.
Les explosions dirigées, comme celle survenue lors de l’éruption du mont Saint Helens en 1980, génèrent des coulées pyroclastiques particulièrement destructrices. Lorsqu’une partie du cône volcanique s’effondre ou explose, elle libère d’énormes quantités d’énergie, créant une coulée capable de détruire des forêts sur une superficie de 600 kilomètres carrés.
La structure d’une coulée pyroclastique se compose d’une avalanche basale dense, se déplaçant au sol comme une coulée de boue, et d’un nuage turbulent de cendres et de vapeur s’élevant au-dessus. La partie basale suit le relief et les vallées, tandis que le nuage de cendres, moins contraint par la topographie, peut s’écouler sur les crêtes et les collines.
La puissance destructrice des coulées pyroclastiques est due à la combinaison de températures extrêmement élevées, d’une vitesse élevée et d’une densité de matériaux élevée. Une coulée peut abattre des arbres jusqu’à 2 mètres de diamètre jusqu’à 25 kilomètres d’un volcan. Même une exposition mineure peut être mortelle pour une personne, en raison de brûlures des voies respiratoires et d’asphyxie par inhalation de cendres chaudes.
Foudre volcanique : orages électriques dans les nuages de cendres
Lors de puissantes éruptions, le ciel peut être illuminé non seulement par le reflet de la lave, mais aussi par de brillants éclairs générés directement dans les nuages volcaniques. Ce phénomène, appelé éclair volcanique ou « orages sales », est observé dans environ 27 à 35 % des éruptions.
Le mécanisme de la foudre volcanique est fondamentalement différent de celui des décharges atmosphériques ordinaires. Il repose sur l’effet triboélectrique : l’accumulation de charges électriques lorsque des particules de cendres se frottent les unes contre les autres dans un nuage éruptif turbulent. De minuscules fragments de verre volcanique, dont la taille varie du micron au millimètre, entrent en collision à des vitesses vertigineuses, transférant des électrons d’une particule à l’autre.
La vitesse d’éjection des téphras joue un rôle clé dans l’intensité de l’activité électrique. L’élévation rapide des nuages de cendres, entraînée par la forte pression des gaz, accroît la friction entre les particules, favorisant ainsi l’accumulation de charges statiques. Des particules de cendres plus fines facilitent une séparation plus efficace des charges.
La recherche a identifié deux mécanismes principaux de génération d’éclairs dans les nuages volcaniques. Près du sol, les nuages de cendres denses produisent de l’électricité statique, un effet comparable à celui du frottement d’un ballon contre ses cheveux. À plus haute altitude, où les cendres volcaniques se mélangent à la vapeur d’eau, des cristaux de glace se forment, dont les collisions génèrent des éclairs selon le même principe que dans les nuages orageux ordinaires.
La hauteur de la colonne éruptive influence la probabilité d’éclairs. Si le nuage s’élève à plus de 7 kilomètres, l’activité électrique devient plus probable, tandis que les éclairs sont rarement observés dans les nuages bas. Les éruptions pliniennes les plus puissantes produisent les décharges électriques les plus intenses.
La foudre volcanique peut parcourir jusqu’à 15 kilomètres, une distance comparable à celle d’un orage ordinaire. Une caractéristique unique est la capacité des décharges à jaillir verticalement directement du sommet du volcan, indiquant que le cône volcanique lui-même se charge électriquement.
Des recherches modernes ont documenté ce phénomène sur des volcans du monde entier : l’Etna en Italie, le Sakurajima au Japon, l’Anak Krakatau en Indonésie et le volcan Taal aux Philippines. L’éruption du volcan chilien Calbuco en 2015 a mis en évidence les deux types d’éclairs : des décharges de faible intensité près du cratère et des éclairs à haute altitude dans la stratosphère.
Émissions de gaz : des participants invisibles aux processus volcaniques
Les gaz volcaniques, bien que moins visibles que la lave et les cendres, jouent un rôle clé dans la dynamique des éruptions et ont un impact significatif sur l’environnement et le climat de la planète. La composition et la quantité des gaz émis constituent d’importants indicateurs de l’activité volcanique et aident à prédire la nature des futures éruptions.
Composition des gaz volcaniques
La vapeur d’eau domine les émissions volcaniques, représentant généralement plus de 70 % du volume total des gaz libérés. Cette vapeur se forme à la fois par le dégazage du magma lui-même et par le réchauffement des eaux souterraines et de surface par des processus géothermiques. Sa forte teneur en vapeur d’eau s’explique par la forte solubilité de l’eau dans les silicates fondus à haute pression.
Le dioxyde de carbone est le deuxième gaz le plus abondant, représentant 10 à 40 % des émissions de gaz. Le CO₂ est peu soluble dans les silicates fondus, surtout à basse pression ; il commence donc à s’échapper du magma à des profondeurs plus importantes. L’évolution du rapport CO₂/SO₂ constitue un indicateur important de l’imminence d’une éruption.
Les gaz soufrés – dioxyde de soufre (SO₂) et sulfure d’hydrogène (H₂S) – représentent entre quelques pour cent et 10 % des émissions gazeuses. Le rapport entre ces composants dépend de la température et des conditions oxydantes du magma : à haute température et dans des conditions oxydantes, le SO₂ prédomine, tandis qu’en milieu réducteur, le H₂S se forme.
Les halogénures d’hydrogène – chlorure d’hydrogène (HCl) et fluorure d’hydrogène (HF) – sont présents en plus petites quantités, généralement inférieures à 5 % du volume total. Ces gaz agressifs se forment lors de l’interaction du magma avec des roches salines et présentent un risque sanitaire important en raison de leur forte corrosivité.
Échelle mondiale des émissions volcaniques
Les observations satellitaires modernes ont permis d’obtenir des estimations précises des émissions volcaniques mondiales. L’instrument OMI du satellite Aura de la NASA a enregistré les émissions de SO₂ de plus de 90 volcans à travers le monde entre 2005 et 2015. En moyenne, les volcans émettent environ 63 000 tonnes de dioxyde de soufre par jour, soit environ 23 millions de tonnes par an.
Ces données indiquent qu’environ 30 % des sources volcaniques présentent des tendances significatives à long terme en matière d’émissions de SO₂. Des tendances positives sont observées sur plusieurs volcans dans certaines régions, notamment au Vanuatu, dans le sud du Japon, au Pérou et au Chili. Cette variabilité reflète l’évolution des systèmes magmatiques et pourrait indiquer des changements dans les processus profonds.
La contribution annuelle des volcans au bilan sulfureux atmosphérique est estimée à 18,7 millions de tonnes de SO₂ provenant du dégazage passif et à environ 11,9 millions de tonnes provenant de l’activité éruptive. La contribution volcanique totale est d’environ 30,6 millions de tonnes de SO₂ par an, comparable aux émissions industrielles.
Impact sur l’atmosphère et le climat
Les gaz volcaniques ont divers effets sur les processus atmosphériques et le système climatique terrestre. Le dioxyde de soufre, pénétrant dans la stratosphère, s’oxyde en acide sulfurique et forme des aérosols sulfatés, qui diffusent le rayonnement solaire, provoquant ainsi un refroidissement de la surface de la planète.
Les éruptions explosives de grande ampleur peuvent injecter d’importantes quantités de SO₂ à des altitudes supérieures à 20 kilomètres, où les aérosols peuvent circuler pendant des années. La durée de vie des aérosols volcaniques dans la stratosphère est de 1 à 3 ans, ce qui dépasse largement celle de la troposphère, qui est de plusieurs jours ou semaines.
Les aérosols sulfatés affectent le bilan radiatif terrestre de deux manières. L’effet direct est la diffusion du rayonnement solaire à ondes courtes vers l’espace, ce qui entraîne un refroidissement de la surface. L’effet indirect est dû au rôle des aérosols comme noyaux de condensation des nuages, modifiant leurs propriétés optiques et leur durée de vie.
Indice d’explosivité volcanique : échelle de destruction
Pour évaluer l’ampleur et le danger potentiel des éruptions volcaniques, les scientifiques ont développé l’indice d’explosivité volcanique (IEV) – une échelle logarithmique de 0 à 8 qui prend en compte le volume de matière éruptive, la hauteur de la colonne éruptive et la durée de l’éruption.
L’IEV 0 correspond aux éruptions non explosives dont le volume d’émission est inférieur à 10 000 mètres cubes. Ces éruptions effusives sont typiques des volcans hawaïens et présentent un risque minimal pour la population, bien qu’elles puissent causer des dégâts matériels importants.
Les éruptions de VEI 1-2 sont classées comme faibles à modérées, avec des volumes d’éjectas compris entre 10 000 et 10 millions de mètres cubes. La colonne éruptive ne dépasse généralement pas 5 kilomètres de hauteur. Ces événements sont assez fréquents et n’ont généralement pas de conséquences planétaires.
Les indices VEI 3-4 correspondent à des éruptions fortes et très fortes, avec des volumes d’éjectas compris entre 10 millions et 10 milliards de mètres cubes. Les colonnes éruptives s’élèvent à des altitudes de 20 à 35 kilomètres, atteignant la stratosphère. L’éruption du mont Saint Helens en 1980 avait un indice VEI de 5.
Les éruptions catastrophiques de VEI 6-7 sont extrêmement rares : une fois par siècle ou millénaire. L’éruption du mont Pinatubo aux Philippines en 1991 (VEI 6) a éjecté environ 10 kilomètres cubes de matière et provoqué un refroidissement global de 0,5 °C. L’éruption du mont Tambora en 1815 (VEI 7) a entraîné une « année sans été » dans l’hémisphère Nord.
Le niveau VEI 8 est réservé aux éruptions supervolcaniques dont le volume d’éjectas dépasse 1 000 kilomètres cubes. De tels événements sont extrêmement rares ; la dernière éruption de ce type a eu lieu il y a 26 500 ans au lac Taupo, en Nouvelle-Zélande. Ces éruptions sont susceptibles de modifier radicalement le climat de la planète pendant des décennies.
Supervolcans : les géants endormis de la planète
Les supervolcans sont une classe particulière de systèmes volcaniques capables de produire des éruptions exceptionnellement puissantes avec un VEI de 8. Ces monstres géologiques se cachent sous une surface trompeusement calme et recèlent le potentiel d’une catastrophe mondiale.
Caldeira de Yellowstone
Le supervolcan de Yellowstone, aux États-Unis, demeure l’un des sites volcaniques les plus étudiés et potentiellement dangereux de la planète. Sa caldeira actuelle, d’un diamètre de 55 kilomètres, s’est formée suite à sa dernière superéruption, il y a 630 000 ans, qui a éjecté 1 000 kilomètres cubes de matière.
L’histoire de Yellowstone comprend trois superéruptions : il y a 2,1 millions d’années (tuff de Hackleberry Ridge, 2 500 kilomètres cubes), 1,3 million d’années (tuff de Mesa Falls) et 630 000 ans (tuff de Lava Creek, 1 000 kilomètres cubes). La première éruption fut la plus puissante, produisant 2 500 fois plus de cendres que celle du mont Saint Helens.
Des études modernes de sondage électromagnétique ont révélé la structure complexe du système magmatique. La majeure partie du magma est concentrée sous la partie nord-est de la caldeira, dans des chambres isolées, représentant 2 à 30 % du volume de la roche hôte. Le volume total de magma rhyolitique est estimé entre 400 et 500 kilomètres cubes.
Lac Toba
Le supervolcan Toba, dans le nord de Sumatra, a provoqué la dernière superéruption de l’histoire de la Terre il y a environ 74 000 ans. Cet événement a eu des conséquences catastrophiques sur le climat de la planète et a peut-être conduit l’humanité au bord de l’extinction.
L’éruption du Toba a éjecté environ 2 800 kilomètres cubes de matériaux denses, ce qui en fait la plus grande éruption explosive des 25 derniers millions d’années. La caldeira, mesurant 100 kilomètres sur 30, est la plus grande caldeira quaternaire au monde.
Les conséquences climatiques ont été un hiver volcanique de 6 à 10 ans et un refroidissement climatique prolongé. Certains chercheurs associent l’éruption du Toba à un goulot d’étranglement génétique dans l’évolution humaine, lorsque la population de nos ancêtres a atteint des niveaux critiques.
La Garita
La caldeira de La Garita, dans le Colorado, a été formée par l’une des plus grandes éruptions volcaniques de l’histoire de la Terre. Cette éruption, survenue il y a 28 millions d’années, a créé le tuf de Fish Canyon, d’un volume d’environ 5 000 kilomètres cubes – la deuxième plus grande éruption du Cénozoïque.
Surveillance et prévision des éruptions
La volcanologie moderne dispose de diverses méthodes pour surveiller l’activité volcanique et prévoir les éruptions. Cette approche globale comprend la surveillance sismique, la mesure des déformations du sol et l’analyse des émissions de gaz et des anomalies de température.
Surveillance sismique
Les séismes précèdent presque toujours les éruptions volcaniques, car le magma et les gaz doivent surmonter la résistance de la roche pour remonter à la surface. La libération continue d’énergie sismique est induite par le mouvement du magma dans les fissures et les conduits souterrains.
La nature de l’activité sismique évolue selon les stades de préparation d’une éruption. Les événements volcaniques sont souvent précédés d’une augmentation des tremblements de fond, c’est-à-dire de faibles vibrations continues associées au mouvement des fluides. À l’approche de l’éruption, le nombre de séismes volcano-tectoniques associés à la fracture rocheuse augmente.
La découverte de variations dans la division des ondes de cisaillement dans les signaux sismiques a ouvert de nouvelles perspectives pour la prévision des éruptions. Des recherches menées au mont Ontake, au Japon, ont montré que les paramètres de division varient en fonction de l’ampleur de l’éruption imminente. Une petite éruption en 2007 s’accompagnait de paramètres stables, tandis qu’avant la grande éruption de 2014, le délai entre les ondes rapides et lentes a doublé et l’anisotropie est passée de 3 % à 20 %.
Surveillance des déformations
La mesure des déformations de la surface terrestre fournit des informations directes sur les processus à l’œuvre dans les systèmes magmatiques. L’accumulation de magma dans les réservoirs souterrains provoque un gonflement de la surface terrestre, tandis que les éruptions entraînent un affaissement.
Les systèmes mondiaux de navigation par satellite (GNSS) nous permettent de mesurer les mouvements de la surface terrestre avec une précision millimétrique. Un réseau de stations GNSS peut détecter même les plus petits changements dans le système magmatique, jusqu’à 10 kilomètres de profondeur.
Le radar interférométrique (InSAR) utilise les données radar satellitaires pour cartographier les déformations sur de vastes zones. Cette technologie est particulièrement utile pour la surveillance des volcans isolés, là où les instruments terrestres sont inaccessibles. Le système traite automatiquement les images des satellites Sentinel-1 et identifie les déformations anormales de 49 volcans à travers le monde.
Les inclinomètres mesurent les variations d’inclinaison de surface avec une précision de l’ordre du microradian, soit l’équivalent de l’élévation de l’extrémité d’une poutre d’un kilomètre de long de l’épaisseur d’une pièce de monnaie. Cette sensibilité permet de détecter les déformations causées par de faibles variations de pression dans les systèmes magmatiques.
Surveillance géochimique
L’analyse de la composition des gaz volcaniques est l’une des méthodes les plus instructives pour évaluer l’état des systèmes magmatiques. Les variations des proportions des différents gaz reflètent les processus se déroulant en profondeur et peuvent précéder les éruptions de plusieurs mois, voire de plusieurs années.
Le rapport CO₂/SO₂ est un indicateur particulièrement sensible. Le dioxyde de carbone commence à être libéré du magma à des profondeurs plus importantes en raison de sa faible solubilité, tandis que le dioxyde de soufre est extrait à des pressions plus faibles plus près de la surface. Une augmentation de ce rapport indique l’afflux de magma frais provenant de sources profondes.
La surveillance de l’Etna a montré qu’une augmentation du rapport CO₂/SO₂ est un signe avant-coureur d’éruptions imminentes. Dans les mois précédant les éruptions de 2006, ce rapport avait atteint des valeurs maximales, suivies du début de l’activité éruptive.
Les mesures des flux de gaz du sol permettent de cartographier les zones de dégazage accru et de suivre l’évolution des taux d’émission de gaz. Cette technique est particulièrement efficace pour les volcans dotés de systèmes hydrothermaux développés, où les gaz migrent à travers des roches perméables.
Effets climatiques : quand les volcans modifient le temps
Les éruptions volcaniques majeures peuvent avoir un impact significatif sur le climat mondial, provoquant des vagues de froid, des modifications des régimes de précipitations et des phénomènes météorologiques extrêmes. L’histoire a été riche en exemples d’activité volcanique provoquant des catastrophes climatiques, des famines et des bouleversements sociaux.
L’éruption du Tambora et «l’année sans été»
L’éruption du mont Tambora, en Indonésie, en avril 1815, fut l’événement volcanique le plus puissant de l’histoire moderne de l’humanité. L’explosion, d’un indice d’énergie volcanique (IEV) de 7, éjecta environ 100 kilomètres cubes de matière à une altitude pouvant atteindre 45 kilomètres.
L’énorme quantité de dioxyde de soufre et de cendres injectée dans la stratosphère a entraîné la formation d’une couche d’aérosols qui a bloqué le rayonnement solaire. Les températures mondiales ont chuté de 0,53 °C, un phénomène apparemment insignifiant, mais qui a eu des conséquences dramatiques sur l’agriculture et l’économie.
1816 est entrée dans l’histoire comme «l’année sans été». En Amérique du Nord et en Europe, des gelées ont eu lieu même pendant les mois d’été de juin, juillet et août, détruisant les récoltes immédiatement après les semis. En Europe du Nord et centrale, les basses températures et les fortes précipitations ont réduit les récoltes de céréales et entravé la fenaison.
Les conséquences économiques furent catastrophiques. Dans une économie entièrement dépendante de la force musculaire animale, les mauvaises récoltes devinrent une véritable catastrophe. Directement ou indirectement, l’éruption du Tambora causa la mort de 90 000 personnes, victimes de famine et de maladies. Les bouleversements sociaux s’accompagnèrent de déplacements massifs de population et d’instabilité politique.
L’hiver volcanique fut aggravé par d’autres facteurs. L’éruption eut lieu pendant le minimum de Dalton, une période de faible activité solaire. De plus, plusieurs éruptions de moindre ampleur précédèrent le Tambora : celle du volcan Mayon aux Philippines en 1814 et une série d’éruptions dans diverses régions du monde entre 1812 et 1813.
Mécanismes de l’impact climatique
Les aérosols volcaniques affectent le bilan radiatif de la Terre par plusieurs mécanismes. Leur effet direct est la diffusion du rayonnement solaire à ondes courtes vers l’espace, ce qui refroidit la surface. Parallèlement, les aérosols absorbent le rayonnement à ondes longues, réchauffant ainsi la basse stratosphère.
Un effet indirect est associé aux modifications des propriétés des nuages. Les aérosols volcaniques agissent comme des noyaux de condensation supplémentaires, augmentant le nombre de gouttelettes dans les nuages et leur albédo. Cela améliore la réflexion de la lumière solaire et favorise un refroidissement supplémentaire.
Les effets climatiques régionaux peuvent différer sensiblement de la tendance mondiale. Les éruptions tropicales induisent une phase positive de l’oscillation nord-atlantique au cours des deux premières années suivant l’événement, entraînant un réchauffement hivernal en Europe et un refroidissement estival dû aux aérosols volcaniques.
Exemples historiques d’anomalies climatiques
L’éruption du Laki en Islande, survenue en 1783-1784, démontre comment même des événements relativement mineurs au regard des normes de l’IEV peuvent avoir des conséquences climatiques considérables. L’éruption fissuraire a duré huit mois et a libéré une quantité massive de dioxyde de soufre, soit environ 122 millions de tonnes.
Les gaz restèrent principalement dans la troposphère, créant un brouillard toxique au-dessus de l’Europe. Les pluies acides endommagèrent la végétation et la pollution atmosphérique causa des problèmes de santé publique. L’hiver 1783-1784 fut exceptionnellement rigoureux, provoquant une crise agricole et des troubles sociaux en France.
L’éruption du Krakatoa en 1883 a créé des effets atmosphériques planétaires. La poussière volcanique présente dans l’atmosphère a coloré les couchers de soleil de tons rouges inhabituels partout dans le monde. Ces effets d’optique ont peut-être inspiré l’artiste Edvard Munch pour son tableau « Le Cri », qui représente un ciel rouge sang.
Dangers cachés : lahars et tsunamis
Outre les effets directs des éruptions, l’activité volcanique génère un large éventail de risques secondaires qui peuvent se manifester des années après la fin de l’éruption. Les lahars et les tsunamis volcaniques comptent parmi les phénomènes volcaniques les plus destructeurs et les plus dangereux.
Lahars : coulées de béton mortelles
Les lahars sont des coulées de boue constituées de matériaux volcaniques mélangés à de l’eau. Ces mélanges de cendres, de débris rocheux et d’eau ont une consistance semblable à celle du béton liquide et sont capables de charrier d’énormes rochers, des arbres et même des bâtiments entiers.
Les sources d’eau des lahars comprennent les lacs de cratère, la fonte des glaciers, les fortes pluies ou la rupture de barrages naturels. Les volcans dotés d’importantes calottes glaciaires sont particulièrement sensibles à la formation de lahars, car la chaleur volcanique peut faire fondre d’importants volumes de glace en peu de temps.
Les lahars se propagent à des vitesses allant de 10 à 200 kilomètres par heure, selon la pente du versant, le volume de matériaux et la teneur en eau. Sur les pentes volcaniques abruptes, les coulées peuvent atteindre 450 kilomètres par heure. Les lahars peuvent parcourir plus de 50 kilomètres depuis leur source, atteignant parfois la côte océanique.
La puissance destructrice des lahars est due à leur forte densité et à leur capacité à transporter de gros débris. Une coulée peut emporter des ponts, détruire des bâtiments et modifier le cours des rivières. Après s’être arrêtée, une coulée durcit, formant une masse solide de plusieurs mètres d’épaisseur qui obstrue les vallées et perturbe les systèmes de drainage.
La tragédie survenue dans la ville néo-zélandaise de Tangiwai en 1953 illustre le danger mortel des lahars. L’éruption du mont Ruapehu en 1945 a créé un barrage naturel de matériaux volcaniques dans le lac de cratère. Le 24 décembre 1953, le barrage a cédé, provoquant un lahar dans la rivière Whangaehu. La coulée a détruit un pont ferroviaire juste avant l’arrivée d’un train, tuant 151 personnes.
Tsunamis volcaniques
L’activité volcanique peut générer des tsunamis par plusieurs mécanismes : coulées pyroclastiques pénétrant dans les bassins hydrographiques, effondrement des pentes volcaniques, explosions sous-marines et activité sismique associée aux éruptions.
L’effondrement de dômes de lave ou de parties d’un cône volcanique dans la mer déplace instantanément d’importants volumes d’eau. Un exemple classique est l’éruption du Krakatoa en 1883, lorsque l’effondrement de la caldeira a généré un tsunami atteignant jusqu’à 40 mètres de haut qui a atteint les côtes de Java et de Sumatra, tuant plus de 36 000 personnes.
Les coulées pyroclastiques pénétrant dans les plans d’eau peuvent également créer des ondes destructrices. La température et la vitesse élevées de ces coulées provoquent instantanément l’ébullition de l’eau et l’explosion de la vapeur, créant des ondes de choc qui se propagent à la surface de l’eau.
Les explosions volcaniques sous-marines représentent un danger particulier en raison de leur soudaineté et de leur imprévisibilité. L’éruption du volcan sous-marin Hunga Tonga-Hunga Ha’apai en janvier 2022 a provoqué un tsunami qui a atteint les côtes des Tonga, des Fidji et d’autres îles du Pacifique. L’explosion était si puissante que son bruit a été entendu jusqu’en Australie, à plus de 2 000 kilomètres de distance.
La ceinture de feu du Pacifique : une usine à catastrophes mondiale
La ceinture de feu du Pacifique est une zone en forme de fer à cheval de forte activité sismique et volcanique qui entoure l’océan Pacifique. Ce système tectonique de 40 000 kilomètres de long abrite 75 % des volcans actifs de la planète et 90 % des tremblements de terre.
La Ceinture de Feu n’est pas une structure géologique unique, mais un système de zones de subduction où diverses plaques tectoniques s’enfoncent sous des massifs continentaux. Cette interaction comprend la subduction des plaques Nazca et Cocos sous la plaque sud-américaine, des plaques Pacifique et Juan de Fuca sous la plaque nord-américaine, et de la plaque philippine sous la plaque eurasienne.
Mécanismes de formation volcanique
La subduction des plaques océaniques crée des conditions uniques pour la formation du magma. La plaque en subduction transporte l’eau de mer et les minéraux hydratés vers le manteau, où les températures et les pressions élevées provoquent la déshydratation. L’eau libérée abaisse le point de fusion des roches du manteau, initiant ainsi une fusion partielle.
Le magma résultant présente une composition andésitique ou dacitique, riche en silice et en matières volatiles. Cette composition détermine la nature explosive des éruptions volcaniques des zones de subduction, contrastant fortement avec les éruptions basaltiques silencieuses des dorsales médio-océaniques.
Les arcs volcaniques se forment à 100-200 kilomètres des fosses océaniques, là où la plaque en subduction atteint des profondeurs de 100-150 kilomètres. À ces profondeurs, une déshydratation intense des plaques volcaniques et une production de magma se produisent. Parmi ces arcs, on peut citer les Andes, la chaîne des Cascades, les îles japonaises et le Kamtchatka.
Caractéristiques régionales
L’arc volcanique andin s’étend le long de la côte ouest de l’Amérique du Sud sur 7 000 kilomètres. La subduction de la plaque de Nazca a créé une chaîne de stratovolcans actifs, dont beaucoup dépassent 6 000 mètres d’altitude. Ojos del Salado (6 893 m) est le plus haut volcan actif du monde.
L’Arc japonais est formé par la subduction des plaques Pacifique et Philippines. Des taux de convergence élevés (jusqu’à 10 cm/an) génèrent une intense activité volcanique. Le Japon compte 47 volcans actifs, dont le mont Fuji, site sacré, et l’un des volcans les plus actifs au monde, le Sakurajima.
L’arc indonésien résulte de la subduction de la plaque indo-australienne sous la plaque eurasienne. La région compte 130 volcans actifs, soit plus que tout autre pays au monde. Certaines des éruptions les plus destructrices de l’histoire s’y sont produites : celles du Tambora (1815), du Krakatoa (1883) et du Toba (il y a 74 000 ans).
Volcans en dehors de la ceinture de feu
Bien que la ceinture de feu du Pacifique concentre la majeure partie de l’activité volcanique, un nombre important de volcans se situent dans d’autres contextes tectoniques. Les dorsales médio-océaniques, les rifts continentaux et les points chauds intraplaques génèrent une variété de configurations volcaniques.
dorsales médio-océaniques
La grande majorité de l’activité volcanique terrestre se déroule sur le plancher océanique, le long des dorsales médio-océaniques. Ces limites de plaques divergentes sont caractérisées par l’écoulement continu de laves basaltiques, créant une nouvelle croûte océanique.
La dorsale Est-Pacifique, la dorsale médio-atlantique et la dorsale Indienne produisent collectivement environ 3 kilomètres cubes de nouvelle croûte par an. Les éruptions à des profondeurs de 2 à 4 kilomètres se produisent sous haute pression, empêchant le dégazage explosif et créant des laves en coussins caractéristiques.
L’Islande représente un cas unique où une dorsale médio-océanique émerge à la surface grâce à l’apport de chaleur supplémentaire d’un panache mantellique. Cela crée une variété de formes volcaniques, des volcans boucliers aux éruptions fissuraires.
Rifts continentaux
Le système de rift est-africain présente un volcanisme associé au rifting continental. L’étirement de la croûte continentale entraîne son amincissement et la fonte du manteau par décompression. Il en résulte une grande variété de manifestations volcaniques, des volcans boucliers basaltiques aux stratovolcans siliciques.
La dépression de l’Afar, en Éthiopie, est considérée comme un bassin océanique naissant où la fragmentation continentale a atteint son stade le plus avancé. Le volcanisme actif comprend l’Erta Ale, l’un des rares volcans possédant un lac de lave permanent.
Volcans intraplaques
Les points chauds, ou panaches mantelliques, génèrent du volcanisme au cœur des plaques tectoniques, loin de leurs limites. Ces sources de chaleur stationnaires brûlent les plaques qui se déplacent au-dessus d’elles, créant ainsi des chaînes de volcans.
La chaîne hawaïenne est un exemple classique de volcanisme de point chaud. La plaque Pacifique se déplace vers le nord-ouest à une vitesse de 3 à 4 cm par an sur un panache mantellique stationnaire, créant une chaîne linéaire d’îles volcaniques. L’âge des volcans augmente avec la distance par rapport au point chaud actif.
Le point chaud de Yellowstone a créé une série de caldeiras qui ont migré vers le nord-est avec le déplacement de la plaque nord-américaine. Les traces de ce point chaud sont visibles sur la Snake River Plain Track, une chaîne d’anciennes caldeiras menant au Yellowstone actuel.
La volcanologie moderne est sur le point de connaître une révolution grâce aux progrès de la télédétection, de l’intelligence artificielle et de la modélisation numérique. Ces avancées promettent d’améliorer considérablement la prévision des éruptions et l’évaluation des risques volcaniques.
Les technologies satellitaires de nouvelle génération, comme l’instrument TROPOMI du satellite Sentinel-5P, offrent une précision sans précédent dans la mesure des gaz volcaniques. Les systèmes de traitement automatique des données permettent de suivre en temps réel l’évolution de dizaines de volcans simultanément.
L’apprentissage automatique ouvre de nouvelles possibilités pour identifier les précurseurs d’éruptions dans de vastes ensembles de données. Les algorithmes sont capables de détecter des corrélations subtiles entre divers paramètres qui échappent aux analyses traditionnelles. Les cartes de déformation probabilistes générées par l’apprentissage automatique sont déjà utilisées pour identifier l’activité volcanique.
La modélisation numérique des processus magmatiques a atteint un niveau permettant de simuler la dynamique complexe des chambres magmatiques, notamment les processus de remplissage, de cristallisation et de dégazage. Ces modèles aident à comprendre les mécanismes physiques qui contrôlent le style et l’intensité des éruptions.