Caractéristiques de la peinture impressionniste Automatique traduire
Les principaux impressionnistes français sont : Claude Monet (1840-1926), Renoir (1841-1919), Alfred Sisley (1839-1899), Camille Pissarro (1830-1903), Bertha Morisot (1841-1895), Paul Cézanne (1839-1906), Degas (1834-1917), et Édouard Manet (1832-1883).
Le réalisme a progressivement conduit à l’impressionnisme : pour en savoir plus sur cette évolution, voir : Du réalisme à l’impressionnisme (1830-1900). Dans leur quête de vérité , les peintres impressionnistes recherchent une impression optique de ce qui est lumineux et éphémère et, par conséquent, la forme en vient à être ignorée. Bien que l’impressionnisme ne soit pas compréhensible pour le commun des mortels, il correspond à l’évolution des idées modernes. Une fois les résistances initiales surmontées, le mouvement s’est répandu dans le monde entier sans discontinuer.
Le succès du nouveau style est tel qu’il provoque rapidement un retour de bâton. La pensée de l’artiste est écartée au profit de sa vision. La réaction prend la forme du Symbolisme, qui aura un impact encore plus grand sur l’art du 20e siècle que l’impressionnisme, car il libère l’art de l’esclavage de l’apparence.
Voir aussi :
Origines et influence de l’impressionnisme
Début de l’histoire de l’impressionnisme
Développement de la peinture impressionniste
Perspectives sur l’impressionnisme
Au cours des siècles, des peintures de l’époque romaine aux paysages lumineux des manuscrits enluminés de Jean Fouquet, en passant par le XVIIIe siècle de Largillier et Jean-Honora Fragonard (1732-1806), les artistes ont cherché à représenter ce qu’ils voyaient. Ils ont étudié, un par un, les différents éléments de la réalité, ou les apparences des choses. Ils se sont surtout intéressés à la lumière, à sa source et à ses effets, mais ils ne sont parvenus à une pleine compréhension de la lumière que vers la fin du XIXe siècle, après bien des hésitations et des fausses pistes.
Le problème de la perspective linéaire, poussé jusqu’à l’absurde, les a détournés des autres problèmes de la perspective aérienne et les a occultés pendant un certain temps. En utilisant des sources de lumière artificielles, l’incidence de la lumière pouvait être orientée de manière à jouer un rôle constructif, révélant la forme au moyen de l’ombre et de la lumière, de l’ombre et de la lumière réfléchies. (Voir aussi clair-obscur et ténébrisme). La lumière devient alors le premier bien de l’artiste qu’il doit utiliser dans des limites étroites.
Cependant, il était inévitable qu’un jour l’artiste voie la vérité visuelle de la réalité, qu’il avait entrevue de temps à autre en reliant les objets à leur environnement. Les artistes ont dû se pencher sur la véritable apparence de la nature, qui avait été falsifiée par la compréhension visuelle scientifique de la Renaissance. Ils doivent regarder la nature d’une nouvelle manière et oublier les techniques qui leur ont été enseignées dans les ateliers.
L’impressionnisme hérite du naturalisme de l’école de Barbizon et de la peinture réaliste de Gustave Courbet (1819-1877). Le nouveau mouvement s’inscrit dans la vision positiviste du monde d’Auguste Comte et se forme dans l’atmosphère créée par les travaux de recherche de Claude Bernard et son «Introduction à la médecine expérimentale». Elle est devenue partie intégrante de la période suivante et a contribué autant que la science la plus avancée à l’ensemble du caractère de la fin de siècle, où la physique et la physiologie ont été reconnues comme les plus importantes.
Au cours du 19ème siècle, les scientifiques ont commencé par expérimenter la matière et sont arrivés aux découvertes atomiques de la physique. Les artistes sont arrivés à la même chose de manière intuitive. Après des siècles de recherche de valeurs tactiles (les valeurs tactiles permettent au spectateur de sentir mentalement «la forme), les impressionnistes ont tenté l’impossible : saisir ce qui est fugitif, fluide, impénétrable et mouvant. Ils tournent le dos aux falaises de Fontainebleau et ne prêtent plus attention au drame des éléments.
Ils préfèrent peindre des rivières et autres scènes aquatiques. Ils préféraient les moments de transfiguration, la vapeur s’élevant dans la chaude lueur du soleil couchant, ou l’eau gelée au milieu de l’hiver ; et ils aimaient toujours peindre les brouillards. Ils aimaient les brouillards londoniens qui obscurcissaient l’architecture, et la fumée des trains qui donnait l’impression que les bâtiments de fer et de brique étaient en apesanteur. La réalité des impressionnistes est une solution de liquide et de lumière dans laquelle tout est immergé. L’impressionnisme peut être considéré comme la lignée d’un grand courant artistique qui, souvent souterrain, réapparaît de temps à autre et menace les monticules du classicisme orthodoxe, les submergeant parfois, comme ce fut le cas à l’époque du baroque puis du romantisme.
L’art baroque, avec sa composition complexe, sa construction dynamique et ses mouvements diagonaux tentaculaires, a également réussi à exprimer l’essence du temps, qui passe inexorablement et qui est éternel. Les artistes baroques ont traduit l’idée du temps en un équivalent plastique, organisé sensuellement plutôt qu’intellectuellement, mais néanmoins utile.
Les impressionnistes puristes ont tenté de reproduire l’écoulement du temps par une imitation déraisonnable de ses effets ; cette ingénuité puritaine a finalement conduit au désastre. Ils pensaient simplement essayer de capter des instants fugaces de lumière, mais au contraire ils sapaient les fondements mêmes de la peinture. Ils n’ont guère remarqué cette catastrophe esthétique. Ils n’étaient pas conscients des peintures dématérialisées qu’ils étaient en train de créer, ni de l’insécurité générale qu’elles engendraient. Au contraire, ils ont continué à chanter leur hymne joyeux aux beautés de la nature, à peindre le temps et la lumière et à ignorer complètement la forme. La composition est ainsi reléguée au second plan, le dessin oublié : seules comptent la lumière et la couleur.
Représentation de la lumière
Ils peignaient comme un oiseau chante, disait Renoir, et comme le rossignol n’est qu’une gorge d’argent, le peintre impressionniste n’était que l’œil. Aux possibilités historiques et esthétiques qui ont permis la naissance de l’impressionnisme, il faut ajouter les qualités de l’œil humain. Si les impressionnistes n’ont pas utilisé son pouvoir d’acuité visuelle comme Jan van Eyck, ils ont néanmoins profité de ses capacités exceptionnelles de discernement. Ils ont résumé les nombreuses nuances et leur amalgame complexe.
De Courbet à Claude Monet, dont Cézanne disait : «Ce n’est qu’un œil, mais quel œil!», s’est instaurée une tyrannie absolue du nerf optique. La vision des impressionnistes oscillait comme entre deux pôles, entre l’œil de Manet et l’œil de Monet, entre le sain et l’anormal. L’œil de Manet est sain, traditionnel et français, selon Mallarmé, qui soutient que la vision de Manet vient du XVIIIe siècle, façonné par l’influence de Jean-Antoine Watteau (1684-1721) et Jean-Honoré Fragonard (1732-1806). Manet a hérité de leur raffinement, de leur intuition et de la clarté enchanteresse de leur vision. En revanche, la vision de Monet semble anormale, comme s’il voyait certaines parties de la scène avec une sensibilité accrue alors que d’autres restaient floues.
Au cours du siècle, la physique a établi de nombreuses lois optiques relatives à la lumière et à la couleur. Les peintres impressionnistes sont parvenus aux mêmes lois sur les bords de la Seine et de l’Oise.
Ils ont aimé observer la lumière se refléter dans l’eau, les jets de lumière traverser la brume, la lumière se décomposer en couleurs du spectre dans les arcs-en-ciel et les éclaboussures. Ils ont remarqué comment la lumière peut changer de forme, et combien l’atmosphère modifie tout ce qui les entoure. Les artistes ont progressivement fait ces découvertes avec leurs yeux et sont parvenus à une nouvelle façon de voir le monde, qui se déploie et change continuellement sous l’influence de la lumière du jour. À cette idole qu’est la lumière, les impressionnistes sacrifient désormais tout. Ils choisissent la lumière comme seul élément et se débarrassent de toute l’hypocrisie du ténébrisme et de toutes les tentations douteuses du clair-obscur .
La lumière est le principe créateur de la visibilité, la lumière est la couleur, le mouvement, le temps, la vie. La lumière trouve tout naturellement son équivalent plastique dans l’eau, fluide, dissolvante, transparente. L’eau partage avec l’air la filiation de l’impressionnisme, qui naît sur le littoral de la Manche, entre Ruel et Frilloz. C’est là qu’Eugène Boudin (1824-1898) a amené le jeune Monet (alors âgé de 17 ans) à peindre. C’est sur cette côte, au Havre, à Honfleur et à Trouville, que Monet s’est développé en tant qu’artiste.
La mer deviendra l’un des sujets de prédilection des impressionnistes. Ils aiment le rythme changeant des vagues, l’impermanence de sa substance, ses couleurs variées et changeantes, sa réflexion et son absorption de la lumière et son pouvoir destructeur, lent ou soudain, qui creuse les rochers d’Etretat ou érode les falaises de Bretagne. Ainsi, le sujet de l’art impressionniste n’est pas l’émotion suscitée par la présence ou la beauté d’un objet, mais l’observation de son comportement physique varié dans l’environnement qui l’enferme, le décompose ou le morcelle.
Les formes ne cessent d’exister que dans la mesure où leurs extérieurs visuels deviennent des surfaces de jeu de lumière et de couleur. Les objets ne sont plus décrits par des lignes et des contours, mais par l’interpénétration des couleurs, qui se décomposent en leurs éléments constitutifs. L’ensemble du tableau est uni par le rapport de la lumière, et il s’agit d’établir la lumière par des moyens purement picturaux. Il y a donc un double changement dans la technique de la peinture : d’une part, les peintres utilisent une nouvelle palette ; d’autre part, ils inventent une nouvelle façon de manier le pinceau.
Notons également deux avantages importants dont ont profité les peintres impressionnistes : d’une part, l’avènement de la photographie, qui a permis de capter de façon permanente les effets instantanés de la lumière. D’autre part, l’invention en 1841 du tube de peinture pliable en étain par l’artiste américain John Rand (1801-1873). Cette source pratique de pigments colorants s’est avérée extrêmement précieuse pour tous les adeptes de la peinture en plein air, principale technique de l’impressionnisme proprement dit.
L’utilisation de la couleur
Les impressionnistes trouvaient que les couleurs utilisées par Eugène Delacroix (1798-1863) et d’autres peintres romantiques du début du XIXe siècle étaient trop sombres pour leurs besoins. Ils préfèrent se limiter plus ou moins aux couleurs du spectre et choisissent le jaune, l’orange, l’azur, le cramoisi, le violet, le bleu et le vert. Cette démarche s’inscrit dans la lignée des études scientifiques de Chevreul, réalisées au début du siècle et rendues célèbres par Delacroix, ainsi que de celles de Maxwell, Young et Lambert, qui ont modifié la chimie de la couleur. D’un point de vue pictural, ce changement est le plus important depuis que Jan van Eyck et Antonello da Messina ont introduit la peinture à l’huile au XVe siècle. (Voir aussi : Palette de couleurs du XIXe siècle .)
Selon la théorie de Chevreul, les couleurs peuvent être divisées en deux groupes : les couleurs primaires - jaune, rouge et bleu - et les couleurs secondaires - orange, formé par le mélange du rouge et du jaune, vert par le mélange du jaune et du bleu, et violet par le mélange du rouge et du bleu. Une couleur secondaire apparaît plus forte lorsqu’elle se trouve à côté d’une couleur primaire qui ne fait pas partie de son mélange. Par exemple, l’orange est intensifié lorsqu’il est placé à côté du bleu, et le bleu est dit complémentaire de l’orange ; de même, le rouge est complémentaire du vert, et le jaune est complémentaire du violet.
Chevreul a observé que les couleurs complémentaires s’annulent lorsqu’elles sont mélangées en proportions égales, ce qui, du point de vue de l’artiste, signifie qu’elles donnent un gris neutre. Il a également remarqué que lorsque deux couleurs complémentaires sont mélangées dans des proportions inégales, on obtient une couleur dégradée, c’est-à-dire une couleur neutre gravitant vers le brun, le gris ou l’olive. Il en découle un certain nombre de lois optiques que l’on peut exprimer en termes quasi algébriques.
Complémentaire pure à côté d’une complémentaire incomplète = dominance de l’une et harmonie des deux ; complémentaire pure dans une teinte claire à côté d’une complémentaire pure dans une teinte foncée = différence d’intensité et harmonie ; deux couleurs semblables l’une à côté de l’autre, l’une pure, l’autre dégradée, produisent un contraste subtil l’une par rapport à l’autre. (Voir aussi : Conseils pour le mélange des couleurs .)
Les impressionnistes peignent de manière intuitive plutôt qu’intellectuelle. Ils étudiaient la nature et utilisaient toutes les équations scientifiques pour faciliter leur recherche de la vivacité. Les lois de la science ont cependant apporté un soutien moral au peintre impressionniste. Il ose désormais faire ce que Delacroix n’a pas pu faire. Le scientifique étudie la lumière pour analyser ses qualités ou pour trouver des moyens artificiels de la produire, tandis que l’artiste tente d’exprimer sa qualité poétique.
Un mélange négatif de couleurs sur la palette réduit leur pureté. L’artiste a donc cherché à obtenir un mélange positif, perçu par l’œil, dans lequel les couleurs conservent leur pureté et semblent vibrer. Vues à une distance convenable, les couleurs pures juxtaposées semblent se fondre sur la surface de la toile, créant ce mélange positif qui reproduit l’aspect de la nature.
La peinture impressionniste est née de la juxtaposition de couleurs pures arrangées selon les lois optiques de la complémentarité pour créer l’apparence de la nature dans une atmosphère lumineuse. Par conséquent, les peintures impressionnistes, et plus encore les œuvres du néo-impressionnisme (une variante du divisionnisme de Seurat), consistaient en un conglomérat de particules colorées, de points ou de taches. En même temps que l’interprétation de la lumière, cette méthode conduit à la fragmentation de toutes les formes du tableau.
Les groupes impressionnistes et leurs styles
L’impressionnisme n’a jamais créé d’école au sens propre du terme, bien qu’il soit le fruit de l’intuition et de l’expérimentation, et malgré les analogies pseudo-scientifiques. Il n’y a pas eu de manifeste, de règles ou de code. Les peintres impressionnistes étaient simplement un groupe (ou plutôt une série de groupes) d’artistes. Il y avait ceux qui évoluaient vers l’impressionnisme en tant que groupe, ceux qui exposaient ensemble en tant que groupe, ceux qui partageaient un style ou une vision similaire, et ceux qui travaillaient ensemble ou les uns à côté des autres. L’impressionnisme était extrêmement orienté vers le groupe, mais chaque membre du groupe vivait dans la crainte que l’appartenance à un groupe ne compromette son individualité.
Trois groupes ont créé l’impressionnisme. D’abord celui que l’on peut appeler l’école de Saint-Simon, où Boudin, Courbet et Johan-Barthold Jongkind (1819-1891) se réunissent à Honfleur, et où le destin de l’impressionnisme est influencé par leur rencontre avec le jeune Monet. Ils sont suivis par deux autres groupes : un groupe de l’Académie suisse qui comprend Cézanne, Pissarro et Armand Guyon (1841-1927) ; et le Groupe des quatre qui se réunit dans l’atelier de Charles Gleyre (1806-1874) et comprend Monet, Renoir, Sisley et Frédéric Bazille (1841-70). Chacun des groupes de l’Académie Suisse et de la Gleyre possède un caractère reconnaissable et distinct qui persiste tout au long de la grande aventure de l’impressionnisme, même si les deux groupes deviennent très proches. Les paysages peints par ces deux groupes sont subtilement différents les uns des autres. Ils utilisent les mêmes principes impressionnistes, mais leur traitement poétique n’est pas le même.
Claude Monet est un peintre de l’eau. Artistiquement, il est resté fidèle à ses origines sur les côtes de la Manche, même si sa maturité s’est déroulée sur les bords de la Seine, à Bougival et Argenteuil. En comparaison, Pissarro peint la terre. Il est plus tempéré et moins violent. Il privilégie les collines de la vallée de l’Oise, entre Pontoise et Auvers, et tourne souvent délibérément le dos à la rivière. Le sujet de son œuvre et même le quartier dans lequel il travaille le rapprochent de Charles Dubigny (1817-1878) et Camille Corot (1796-1875).
Il y a un chevauchement constant entre les artistes qui privilégient l’eau comme objet de représentation et ceux qui privilégient la terre. Sisley est peut-être le plus fidèle à l’esprit général de l’impressionnisme. Chronologiquement, l’impressionnisme gravite vers la peinture de l’eau jusqu’en 1880, puis vers la peinture de la terre après la cinquième exposition de la Société anonyme des peintres, sculpteurs et graveurs, comme les impressionnistes se désignaient eux-mêmes.
Parmi les œuvres importantes de Monet, on peut citer : Plage de Trouville (1870, Wadsworth Atheneum) ; Impression, lever de soleil (1873, Musée Marmottan-Monet) ; Champ de coquelicots (Argenteuil) (1873, Musée d’Orsay);  ; Gare Saint-Lazare (1877, Musée d’Orsay);  ; Nymphéas (1897-1926, divers musées d’art) ; Étang aux nénuphars : Harmonie verte (1899, Musée d’Orsay).
Plus tôt encore que Pissarro et Monet, Édouard Manet devient le chef de file du mouvement impressionniste. L’environnement esthétique et social de Manet est différent de celui des autres impressionnistes ; il n’a jamais été pleinement intégré au mouvement. Pour lui, l’impressionnisme n’a été qu’une expérience passagère, mais il a été suffisamment sincère pour que cela influence le développement de son art. Il serait plus juste d’appeler Manet non pas le chef des impressionnistes mais le chef des artistes révolutionnaires, ceux qui sont rejetés par le Salon et ceux qui sont rejetés par la société ; il était le chef d’un groupe mixte d’artistes qui se réunissaient au Café «Herbois» aux Batignolles.
Les célèbres tableaux de Manet Déjeuner sur l’herbe (1863) et Olympia (1863) ont été exécutés dans le style appelé peinture claire, mais ils n’étaient pas encore impressionnistes. Manet est venu à l’impressionnisme par ses propres moyens et pas à pas : d’abord à Boulogne dans quelques marines et scènes de plage ; ensuite, et surtout, en regardant des corridas dans les reflets vibrants et les couleurs flamboyantes de l’Espagne ; et enfin sur la côte atlantique d’Arcachon et de Bordeaux. Voir «Marchands ambulants, rue Bern» (1878), et son célèbre tableau «Bar aux Folies Bergères» (1882).
Manet n’a jamais été attiré par l’impressionnisme et n’a jamais exposé avec lui, ce qui souligne ses inclinations personnelles. Il s’inspire de Berthe Morisot, élève de Corot, qui est comme une bouffée d’air moderne dans l’atelier de Manet. Manet pousse l’expérience jusqu’à vivre à Argenteuil en 1874 et à peindre des scènes de rivière.
Manet laisse cependant la direction de l’impressionnisme à Monet, qu’il considère comme le grand prêtre du nouveau style. L’esthétique de l’impressionnisme a été formulée sur la base du travail expérimental de Monet. Plus tard, Monet dut quitter ses amis parce que «le groupe restreint s’était transformé en une populace sans esprit critique, prête à accueillir n’importe qui dans ses rangs». Monet reste le gardien de l’idéal impressionniste, même s’il est finalement accepté au Salon, et même si quelques collectionneurs avisés achètent ses œuvres.
Dans certains salons du Faubourg-Saint-Germain, on pouvait voir ses tableaux aux côtés d’œuvres de Renoir, qui était déjà à cette époque un artiste relativement académique. Il est important de comprendre que Monet est la pierre angulaire de l’impressionnisme, un style qui s’est répandu internationalement dans toutes les formes d’art et qui reflétait donc bien l’esprit matérialiste de l’époque.
Voir aussi :
L’impressionniste Édouard Manet
L’impressionniste Claude Monet
Renoir, Sisley, Pissarro, Degas, Cézanne
Claude Monet et Camille Pissarro en voyage à Londres
Degas a commencé comme réaliste classique - voir La famille Bellelli (1858-67) - et a ensuite développé son propre style de peinture de genre impressionniste, avec un accent particulier sur les chevaux de course - voir Chevaux de course. Chevaux de course devant les tribunes (1866-8) - les femmes à la toilette - voir Femme se brossant les cheveux et les femmes au travail - voir Femmes repassant (1884).
Paul Cézanne est peut-être l’artiste le plus difficile à classer en termes de style. Il a commencé comme réaliste, puis est passé à l’impressionnisme sous l’influence de Pissarro - voir, par exemple, Dom Cézanne. La maison du pendu (1873) - et a ensuite développé son propre idiome «de l’impressionnisme abrégé», en particulier dans les portraits et les œuvres de genre telles que : Garçon au gilet rouge (1889-90), Homme fumant la pipe (1890-2), Femme à la cafetière (1890-5), Joueurs de cartes (1892-6), Dame en bleu (c. 1900) et Jeune femme italienne s’appuyant sur son coude (1900).
L’impressionnisme dans le reste de l’Europe
Les découvertes scientifiques se font parfois simultanément dans plusieurs pays. La pensée qui sous-tend l’impressionnisme est un phénomène d’époque, et il est intéressant de constater l’ampleur qu’elle prend dans les pays étrangers à peu près à la même époque.
En Italie, le mouvement artistique florentin de Macchiaioli (1855-80), né des événements de 1848, semble correspondre à l’impressionnisme français, bien qu’il ne lui soit pas directement lié. Les peintres florentins du XIXe siècle maîtrisent la technique de l’application de couleurs saturées et sourdes de manière impressionniste. Les Macchiaioli, encouragés par l’un de leurs théoriciens, Adriano Cecchioni, cherchent à créer l’impression d’une vérité visuelle vue de loin. Ils peignent avec des tons de couleur distribués en touches, et c’est le ton qui crée la sensation de profondeur. Giovanni Fattori et les autres Macchiaioli tentent une nouvelle méthode de représentation des formes qu’aucun Italien ne peut ignorer complètement. Ils utilisent à la fois la couleur et le pinceau ; le pinceau est utilisé de manière large et avec des coups de pinceau directionnels pour créer une impression de volume.
Les artistes français et italiens sont presque identiques dans leur nouveau goût pour la couleur : l’artiste français utilise la couleur pour créer une lumière picturale, l’artiste italien utilise la couleur pour créer un volume, et tous deux l’utilisent pour créer un sens de l’espace. Ils utilisent également des techniques de pinceau similaires. Le Café Michelangelo, lieu de rencontre de Macchiaioli, n’est pas sans rappeler le Café Guerbois et la Nouvelle Athène.
Serafino De Tivoli (1826-92) voyage beaucoup et introduit dans la pensée florentine des idées étrangères, notamment celle de la mise en valeur de la lumière. Vito D’Ancona (1825-1884) reste résolument fidèle au volume constructif, Telemaco Signorini (1835-1901) se rapproche de la vision française et Vicenzo Cabianca (1827-1902) utilise un pinceau fort pour produire de forts contrastes. Giovanni Boldini (1842-1931) est l’un des artistes les plus audacieux de Macchiaioli. En Italie, il utilise le pinceau brisé pour créer l’illusion du mouvement. Lorsqu’il arrive en France, curieusement, il ne veut rien savoir de l’impressionnisme. Pendant qu’il travaillait en France, il a créé des peintures piétonnes aussi superficielles qu’artificielles. De même, le style précoce de Giuseppe de Nittis (1846-1884) est associé à Macchiaioli. Il rencontre Degas à Paris et subit l’influence de l’impressionnisme. Son interprétation du nouveau style est restée tout à fait individuelle : les contours sont dessinés avec précision, et il y ajoute une agréable différence de valeurs tonales. Federigo Zandomeneghi (1841-1917) est probablement le plus impressionniste de tous les Italiens et, alors qu’il est encore à Florence, il se distingue de ses contemporains par son étude de la lumière. Arrivé à Paris, il rencontre Manet, Degas, Renoir et Pissarro, avec lesquels il expose, mais ses origines vénitiennes sont toujours évidentes dans son œuvre.
En Espagne, les développements de l’époque en matière de paysage et de lumière sont inaugurés par Martin Rico et Aureliano de Beruete. Ces trois artistes ont été fortement influencés par l’école de Barbizon. Parmi les autres artistes, citons Pedro Villalmil, qui était un romantique, Carlos de Hayes et Ceferino Araujo y Sanchez. Malgré la forte individualité des artistes espagnols, ils ne sont pas restés à l’écart des développements français.
Le peintre basque Zuloaga a utilisé la technique impressionniste à ses débuts. Cependant, la libération de la peinture espagnole est largement due à l’œuvre de Joaquín Sorolla y Bastida (1863-1923). À Madrid, il est à l’origine du mouvement vers la peinture spontanée en plein air, suivi par Dario de Regoyos, Joaquín Mir et Germán Anglada-Camarosa, ainsi que par ceux que l’on appellera plus tard «la génération 1910», notamment Francisco Merenciano, dont l’œuvre représente les dernières lueurs de l’impressionnisme espagnol.
Les artistes allemands ont eu l’occasion de voir des tableaux impressionnistes français lors d’une exposition de leurs œuvres à Munich en 1879. Certains artistes, déjà familiarisés avec le réalisme de Courbet et de Manet, savaient à quoi s’attendre lors de cette exposition. Il s’agit de Wilhelm Leibl (1844-1900), Mihaly von Munkacsi et Otto Scholderer, ainsi que des peintres viennois Karl Schuch et Hans Thoma. Franz von Lenbach (1836-1904) et Anton von Werner, qui étaient des artistes académiques, n’en ont pas compris l’importance. En Italie, la nouvelle esthétique de la lumière se heurte à la tradition de la forme ; en Allemagne, elle se heurte à la tradition profondément enracinée du dessin et de l’art graphique. Le conflit se situe entre «l’espace couleur» et la ligne analytique.
Les peintres de plein air allemands sont restés plus proches des impressionnistes français inspirés par le réalisme, comme Manet et Degas, que de Monet et Pissarro. (On peut en dire autant de plusieurs artistes français ultérieurs, dont Jules Bastien-Lepage (1848-84), Alfred Roll et Henri Gervaix).
En Allemagne, c’est à Berlin que l’impressionnisme a eu le plus d’influence. Max Liebermann (1847-1935) va plus loin que les œuvres en plein air de T. Hagen. Il s’inspira de l’exemple de Manet et de Degas et, avec les membres de la Sécession, s’approcha de la couleur et du mouvement impressionnistes, mais son œuvre conserva toujours une certaine froideur. Les dernières œuvres de Lovis Corinth (1858-1925) sont peintes avec une technique violente et brutale. Dans ses œuvres, la matière elle-même semble vibrer en raison de sa parfaite compréhension de la lumière et de l’air. Max Slevogt (1868-1932), l’impressionniste bavarois, ne pouvait se résoudre à abandonner la ligne ; mais Emil Nolde (1867-1956) a comblé d’un seul coup le fossé qui séparait Manet de Van Gogh.
L’impressionnisme atteint la Suisse avec les œuvres d’A. Bod-Bovy et du symboliste Arnold Bocklin (1827-1901). Il est arrivé en Autriche avec les peintures de Gustav Klimt (1862-1918), et en Hongrie avec les œuvres de Pal von Schiney Merce, Karoly Ferenczy, Etienne Csoka et Jozef Rippl-Ronai. L’œuvre de Schinei Merce «Pique-nique en mai» retrace l’influence de Courbet et de Manet. Ferenczy est influencé par Bastien-Lepage ; Ripple-Ronais fréquente les membres du groupe Les Nabis, comme Edouard Vuillard (1868-1940) et Pierre Bonnard (1867-1947) ; Etienne Choque peint en série, comme Monet.
La Belgique et la Hollande reproduisent toutes les réalisations artistiques françaises du siècle et participent au mouvement impressionniste. En Belgique, Emile Claus est influencé par Monet et Pissarro, H. Evenepoel est lié artistiquement à Manet et Toulouse-Lautrec (1864-1901), et Albert Baertsoen à Roll. La Hollande, avec son climat humide et son ciel nuageux, a été visitée par plusieurs impressionnistes. Boudin y voyage et étudie les œuvres de Ludolf Bahuizen et de Willem van de Velde. Monet a peint à Zaandam et Amsterdam en 1871, et à Leyde et La Haye en 1886. Albert Lebour a visité ce pays en 1896. Johan Barthold Jongkind (1819-1891) était un Hollandais, et l’un des premiers impressionnistes à rejoindre les autres en France. Van Gogh était également hollandais, et son art est né au contact des impressionnistes en France. Son impressionnisme a fini par être plus proche de l’expressionnisme allemand des années 1900 que de n’importe quel idiome français.
L’Angleterre, ainsi que la Hollande, ont apporté leur contribution. Pissarro et Monet y sont venus et ont trouvé l’inspiration dans les brumes, les brouillards et les pluies de l’Europe du Nord, ils ont aussi découvert les œuvres de Turner, qui les ont enthousiasmés. Sisley et Walter Sickert (1860-1942) - chef de file du Camden Town Group sont anglais ; Dieppe est particulièrement attirée par Sickert, dont l’œuvre s’enrichit de l’influence de Degas et de Whistler.
Au Danemark, l’impressionniste le plus important fut P.S. Kroyer (1851-1909), qualifié de virtuose de la lumière diffuse. Wilhelm Hammershøj (1864-1916), peintre du genre intimiste connu pour ses intérieurs feutrés dans les tons bleus et gris, a également joué un rôle important. Les artistes suédois ne se sont pas seulement rassemblés dans le village de Grös-sur-Loing. Un groupe d’entre eux se tourne vers le nouveau Paris des Batignolles.
Parmi eux, on trouve Anders Zorn (1860-1920), dont la carrière est plus parisienne qu’internationale, Ernst Josefson, qui reconnaît Manet comme son maître, Carl Larsson, qui préfère Sisley, et Bruno Liljefors. En Norvège, l’impressionnisme se manifeste par un grand intérêt pour la peinture de l’eau en mouvement. Christian Krogh était connu comme le Manet norvégien, tout comme Fritz Taulov. Edvard Munch (1863-1944) et Erik Werenskiold étaient des peintres figuristes. Munch fut d’abord l’élève de Bonn, puis fut influencé par Cézanne, Degas et le symboliste Odilon Redon (1840-1916).
En dehors de la France, l’impressionnisme se répand lentement. Il est souvent confondu avec des mouvements ultérieurs tels que le pointillisme et le divisionnisme italien. Il y a eu un mélange général des styles français, souvent mêlé à un académisme local désireux d’explorer de nouvelles possibilités. L’impressionnisme a continué à influencer les pays hors de France jusqu’à la Première Guerre mondiale.
En Pologne, la peinture à grand spectacle est représentée par Joseph Pankiewicz, ami de Renoir, Bonnard, Signac et Vuillard. Pankiewicz continue à développer le style impressionniste jusqu’à sa mort en 1940.
En Russie, le nouveau style est adopté par des groupes tels que «Le monde de l’art» et «Les Peredvizhniki», un groupe de peintres paysagistes. Ilya Repin (1844-1930) est un génie à part entière ; Isaac Levitan (1860-1900) s’inspire de Monet, Valentin Serov (1865-1911) de Manet, et Maria Bashkirtseva de Bastien-Lepage ; les derniers feux de l’impressionnisme attirent Pavel Kuznetsov en France, où il meurt en 1935.
L’impressionnisme en Amérique et en Australie
L’impressionnisme n’est pas confiné à l’Europe. Il est déjà fortement redevable au Nouveau Monde, puisque Pissarro est originaire des Antilles. En fait, il était plutôt cosmopolite, puisque ses ancêtres étaient portugais, français et juifs, et qu’ils s’étaient installés sur une île danoise. Par ailleurs, avant que l’Amérique du Nord n’entre dans la peinture impressionniste, plusieurs artistes y ont contribué - Whistler (1834-1903), devenu très français et fortement influencé par Courbet, Manet et Henri Fantin-Latour ; l’artiste de Pittsburgh Mary Cassatt (1845-1926), une jeune admiratrice de Degas ; William Merritt Chase (1849-1916), un des premiers représentants de l’impressionnisme en Amérique, connu surtout comme un excellent professeur d’art ; Alden Weir (1852-1919), connu pour ses paysages ainsi que pour ses natures mortes, ses peintures de fleurs et ses portraits plus conservateurs ; Childe Hassam (1859-1935), qui a étudié l’impressionnisme à Paris (1886-9) ; et, bien sûr, le grand portraitiste John Singer Sargent (1856-1925) - célèbre pour ses chefs-d’œuvre impressionnistes «Edward Darley Boyte’s Daughters» (1882) et «El Haleo» (1882), qui a décliné une invitation à exposer avec un groupe d’impressionnistes.
En Australie, le style impressionniste est illustré par l’école de Heidelberg près de Melbourne, pratiquée par Tom Roberts (1856-1931), Arthur Streeton (1867-1943), Charles Condor (1868-1909), et Fred McCubbin (1855-1917) - était beaucoup plus proche du naturalisme de Bastien-Lepage que du pinceau ultra-libre de Monet. Pour plus de détails, voir : Impressionnisme australien (1886-1900).
Pour en savoir plus sur l’influence de l’impressionnisme, voir les articles suivants :
Expositions impressionnistes à Paris
La scission du groupe impressionniste
L’héritage impressionniste de Monet
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