Peinture romane en France Automatique traduire
En ce qui concerne la peinture romane en France, outre la Touraine et les provinces voisines, Maine, Anjou, Poitou, Berry et Orléans, qui constituent une région particulièrement favorable, il faut mentionner trois autres zones importantes : la Bourgogne, l’Auvergne et le Roussillon. Nous étudierons ce dernier en relation avec l’art roman de Catalogne, puisque le Roussillon était principalement une région dépendante de la Catalogne jusqu’au traité d’Ibérie en 1659.
Comme le suggère le chercheur en art roman Dupre, la peinture médiévale en France peut être grossièrement divisée en quatre groupes, qui diffèrent par la manière :
❶ les peintures à fresque de l’ouest, aux couleurs sourdes sur fond clair ;
❷ les peintures lumineuses sur fond bleu, que l’on trouve principalement en Bourgogne et dans le sud-est ;
❸ les peintures d’Auvergne, aux fonds sombres ; et
❹ les peintures catalanes des Pyrénées orientales. Bien entendu, cette division n’est valable qu’en termes généraux, et l’on peut trouver des peintures à fond clair en Auvergne et en Bourgogne. En tout état de cause, de nombreuses œuvres ne peuvent être rattachées à une école ou à un groupe particulier.
Une étude attentive de toutes les fresques françaises permet de conclure que la France a été moins soumise à l’influence byzantine que, par exemple, la peinture romane en Italie ou la peinture romane en Espagne ; en règle générale, les fresques françaises conservent les traditions de l’art carolingien, transformé à l’époque romane par le génie créatif des artistes locaux. Il est difficile de déterminer - la destruction complète des fresques des périodes antérieures rend les comparaisons nécessaires impossibles - dans quelle proportion l’apport de l’art romain et byzantin a influencé la formation de l’art religieux roman en France. (Par ailleurs, une autre œuvre d’art célèbre produite en France à l’époque romane est la tapisserie de Bayeux).
La peinture romane dans le Maine, l’Anjou, le Poitou, le Berry et l’Orléanais
)La chapelle du monastère de St Gilles à Montoir était entièrement recouverte de peintures, dont il ne subsiste que les peintures de l’abside primitive, peinte à fresque avec des ajouts de détrempe et d’encaustique, et de l’abside du transept et des deux absidioles. Cette chapelle, très belle malgré les nombreuses modifications qu’elle a subies au cours des siècles, était autrefois celle de l’abbaye de Ronsard. Elle est périodiquement menacée par la brusque montée des eaux de la Loire. L’humidité a complètement érodé le sol des peintures à la base des murs, d’autant plus que les crues successives du fleuve les ont ensevelies sur plus d’un mètre de profondeur.
L’art biblique de Saint-Gilles présente un spectacle exceptionnel et très saisissant. Le Christ est représenté dans trois absides et sur la voûte de l’arc triomphal ; dans l’abside centrale, on le voit enseigner, dans l’abside méridionale remettre les clés à saint Pierre, dans l’abside occidentale envoyer le Saint-Esprit à ses apôtres. L’influence carolingienne est évidente, notamment dans la peinture de l’arc de triomphe, où l’on voit le Christ en médaillon couronner la Vertu qui a vaincu le Vice.
Non loin de Montoir se trouve l’église St Jacques de Guéré - à Troot, elle est également à la merci du niveau de la Loire.
Sur le mur nord du chœur, sur deux registres, sont représentés le Massacre des Innocents et la Nativité. A gauche de la fenêtre axiale se trouve une touchante Crucifixion avec la Vierge et saint Jean au pied de la croix, en noir et vert avec une bordure jaune. Dans l’embrasure de la fenêtre se trouvent le doigt de Dieu, saint Georges et saint Augustin. Sur le mur sud, on voit l’Orgueil vaincu et la Colère se transperçant d’une épée. Vient ensuite le Paradis avec l’immense figure de saint Pierre, puis le martyre de saint Jacques, la légende de saint Nicolas et enfin la résurrection de Lazare.
Cet ensemble de peintures, dont l’expressionnisme anticipe l’art gothique, n’a été exécuté que dans la seconde moitié du XIIe siècle. A noter les nouveaux pigments de couleur : un lilas inhabituel, et des combinaisons de jaune citron ou de jaune de cuivre avec du vert d’amande.
Le chœur de l’église d’Aréines, dédié à Notre-Dame du Carmel, est décoré de peintures alliant raffinement et grandeur, où les personnages, se détachant sur un fond clair, sont entourés d’un contour épais mais clair et distinct. Le détail que nous avons montré, la tête du saint, où les yeux se détachent en blanc (étant en cire pour briller plus que le reste de l’objet, ils se sont détachés du mur), est un exemple frappant de l’habileté atteinte par les peintres médiévaux de cette région au XIIe siècle.
En 987, le jour de l’avènement des Capétiens, Thibault, comte de Tours, fonde le monastère de Tavant. Cependant, ce n’est pas l’église du monastère (détruite par un incendie en 1070) mais l’église paroissiale Saint-Nicolas qui est célèbre pour ses fresques. Dans la crypte, salle basse et obscure dont la voûte, dépassant à peine le niveau de la tête, est soutenue par deux rangées de quatre colonnes, les fresques décorent les arcs entre les colonnes. Elles constituent l’un des plus beaux ensembles de peinture romane en France, mais elles risquent de disparaître dans quelques années si des mesures radicales ne sont pas prises pour les préserver.
Pour une comparaison de la peinture en France et en Russie à l’époque romane, voir : La peinture médiévale russe (950-1100). Pour une comparaison de l’influence byzantine sur les écoles française et russe, voir : L’école iconographique de Novgorod (1100 et suivants).
Le thème central doit être interprété comme une lutte entre le bien et le mal, dans laquelle des scènes, souvent sans lien direct entre elles, sont tirées soit de l’Ancien ou du Nouveau Testament, soit d’autres sources. Sur un enduit mince, se détachant sur un fond clair, les figures, seules ou en groupe, peintes dans des couleurs simples mais fortes (ocre rouge et jaune, rouge-brun et vert terre), ont une force expressive fascinante.
Parmi les scènes les mieux conservées, le Christ aux Enfers délivrant Adam et Eve, David tuant un lion, et la figure d’un homme frappant des mains, généralement identifiée comme Saül, sont autant de preuves du génie de l’artiste qui a su utiliser avec brio l’espace étroit de la crypte.
Peinture romane à St Savin
L’opinion exprimée par Mérimée en 1845, alors qu’il était intendant des Beaux-Arts, est toujours d’actualité : les fresques de Saint-Savin représentent le plus important et le plus magnifique ensemble de peinture religieuse de style roman en France. L’église de l’abbaye de Saint-Savin, d’une taille exceptionnelle (la nef mesure près de 43 mètres de long et 12 à 15 mètres de haut), comprend quatre grands ensembles de peintures : le porche, le chœur, la nef et la crypte. Plusieurs artistes ont travaillé à Saint-Savin, mais, comme si un maître avait dirigé leur travail collectif, les différentes parties ont été exécutées avec une telle similitude de sentiment, sans intervention de méthode personnelle, que l’on peut parler du «style de Saint-Savin».
FRESCOESTS ROMANS FRANÇAIS
Les murs et les plafonds des églises ont été largement décorés en France aux XIe et XIIe siècles. Ces peintures murales, composées principalement de scènes tirées de la Bible, étaient destinées à informer les fidèles, en grande partie illettrés, et constituaient une forme de piété. Les fresques romanes françaises se caractérisent par une imagerie plus abstraite, plus dynamique et plus animée qu’ailleurs en Europe. L’église de l’abbaye de Saint-Savin sur Gartamp est le meilleur cadre pour de telles œuvres picturales. Pour une comparaison avec la peinture allemande, voir : L’art médiéval allemand (800-1250).
Dans la voûte de la nef, les trois premières travées sont traversées par des arcs doubleaux, le reste étant une surface continue. Le cycle de peintures comprend successivement : la Création, la Chute, Caïn et Abel, les histoires de Noé, Joseph et Moïse ; trente-six scènes en tout, dont l’ordre est interrompu ici et là, probablement en raison des conditions de construction : les peintres devaient achever leur tâche avant que le travail des maçons ne soit terminé.
L’effet général de la voûte est des plus saisissants. Ne se limitant pas au type classique de fond à bandes horizontales de couleur, comme à Brinet ou à Ebray, les artistes de Saint-Savin ont audacieusement rompu avec la coutume en utilisant des bandes nervurées ou ondulées, interrompues, lorsqu’ils voulaient souligner telle ou telle figure, par des zones de couleur plus foncée. La composition d’ensemble est cependant remarquablement harmonieuse, avec son équilibre de zones claires et sombres, de touches larges et étroites, de qualité et de noblesse disegno .
Dans la chambre d’entrée de la nef (le porche servant de base à la tour), la décoration murale, aujourd’hui en voie de disparition, est d’une beauté remarquable. Une série de visions - un archange vainqueur d’une bête, une invasion de sauterelles, des chevaux blancs à tête humaine couronnée - culmine au-dessus de l’arc qui mène à la nef dans une représentation du Christ en gloire dans la Jérusalem céleste.
La chambre voûtée de la galerie est aussi haute que la nef, et les peintures qui s’y trouvent, aujourd’hui très effacées, devaient compter parmi les plus belles de St Savin. Malheureusement, les détails qui nous sont parvenus ne nous permettent que de deviner leur qualité exceptionnelle. Les peintures de la crypte représentent des épisodes de la vie de St Savin et de St Cyprien.
La différence de technique entre ces fresques et celles du porche, de la galerie et de la nef est considérable. Ici, au lieu d’être divisés en différents sujets, les thèmes sont traités de façon presque continue. Les couleurs sont beaucoup plus sombres, les figures sont plus maladroites et les sujets sont répétés plusieurs fois, presque de manière monotone. De nombreux experts ont conclu qu’il s’agissait de l’œuvre d’un autre artiste. Pourtant, après une étude approfondie, nous nous rangeons à l’avis de Deschamps qui considère Saint-Savin comme l’œuvre d’une équipe sous la direction d’un maître artiste.
Pour en savoir plus sur l’art médiéval et la conception des bâtiments, voir : Architecture romane (vers 800-1200). Pour un guide général de la peinture d’église, voir : L’art chrétien (150-2000).
Les fresques de l’église Saint-Martin-de-Vie du Bourbonnais, découvertes en 1849 par le curé de la paroisse, ont été classées à la suite d’un recours de Georges Sand. Cela ne les a pas mis à l’abri de nouvelles vicissitudes.
Le plan architectural de l’édifice est étrange. Un mur, percé d’une arcade, sépare le chœur de la nef. Ce mur, le chœur et l’abside sont recouverts de peintures en très bon état de conservation. Le choix des sujets a manifestement été déterminé par les mêmes intérêts moraux qu’à Saint-Savin : les cycles de la Passion, de la Genèse, ainsi qu’un grand tableau de la vie de saint Martin, patron de l’église, et un sujet édifiant, la parabole de la Diva et de Lazare. Si les scènes représentées sont similaires, l’exécution est très différente. Nous sommes ici en présence d’un art plus populaire, pictural et anecdotique. Le sens de la forme plastique s’allie à une richesse de couleurs exubérantes et à un désir de caricature ; les figures sont rudes et souvent laides, rappelant que les principaux éléments de l’art carolingien ou ottoman sont ici fortement teintés d’un esprit gaulois.
Dans l’abside, la crucifixion de saint Pierre côtoie le Christ devant Hérode. Dans le chœur, sur le mur nord, au registre inférieur : la parabole de Diveev et de Lazare ; au registre central : le lavement des pieds, le baiser de Judas et l’arrestation de Jésus ; saint Martin occupe le registre supérieur. Sur le mur sud se trouve la suite de l’histoire de Diveev ; les peintures du registre médian ont disparu ; sur le registre supérieur se trouvent l’Entrée à Jérusalem et la Purification de la bouche d’Isaïe avec du charbon ardent.
A Saint-Henrien-sur-Cher, la crypte, construite en même temps que la collégiale, est très vaste ; elle se compose d’une chapelle centrale entourée d’un déambulatoire desservant trois chapelles.
Des fresques de la chapelle axiale, qui datent du début du XIIe siècle, il ne reste qu’un médaillon avec l’Agneau et deux symboles des évangélistes. A la fin du même siècle, la chapelle fut remodelée et la scène «de la Résurrection de Lazare» qui nous est parvenue de cette époque est d’une grandeur impressionnante. L’austérité du visage du Christ, la teinte de ses cheveux et de sa barbe sont aussi frappantes que la singularité de ses vêtements. Au-dessus de Lazare, nous voyons les figures de ses proches étonnés.
La décoration de la chapelle Saint-Gilles, consacrée à l’histoire de ce saint, est d’une exécution tout à fait différente ; le dessin est plus grossier, les couleurs plus sombres, quoique subtiles et éclatantes. Dans le dessin à l’extrême gauche, saint Gilles donne son vêtement à un malade qui retrouve la santé, puis il sauve un homme mordu par un gros serpent, et enfin il calme une tempête par la prière.
A Poitiers, il faut noter les fresques de la crypte de Notre-Dame-la-Grande, où deux tableaux représentant des saints, des confesseurs tenant un livre et des martyrs avec des couronnes, sont clairement inspirés de l’art carolingien et pourraient dater du XIe siècle.
Toujours à Poitiers, la basilique Saint-Hilaire contient quelques vestiges remarquables de peintures de la fin du XIe siècle ou du début du XIIe siècle. Parmi celles-ci, on peut noter la figure d’un saint tenant un livre, et les portraits des évêques de Poitiers.
Note : Poitiers fut, avec l’Ile-de-France, un centre important de l’art du vitrail, et des maîtres qui s’y rattachaient. Voir aussi matériaux et méthodes du vitrail .
Les peintures de l’église de St-Eignan-de-Brinay, découvertes en 1913, datent probablement du début du XIIe siècle. Comme à Vic, le chœur du sanctuaire est séparé de la nef par un mur percé d’un arc en plein cintre. Les fresques, disposées sur deux registres, illustrent l’enfance du Christ et plusieurs épisodes de sa vie publique : l’Annonciation, la Visitation, l’apparition de l’ange aux bergers, le voyage des mages, l’assassinat des innocents, la Présentation au temple, le sommeil de Joseph et sa fuite en Égypte ; puis la Tentation du Christ et les Noces de Cana. Ce cycle de peintures, où les groupes se détachent sur un fond de rayures jaune orangé, blanches et bleu-vert, est caractérisé par l’harmonie et la tranquillité. Les personnages aux visages étroits et aux jambes allongées rappellent, d’une part, les figures de Saint-Savin et de Tavant avec leurs traits carolingiens, et Saint-Georges d’Oberzell en raison d’une certaine influence ottonienne.
Un rapide survol de tout un ensemble d’églises de l’ouest de la France dans lesquelles les peintures sont malheureusement en très mauvais état et même en voie de disparition rapide - par exemple la chapelle de Saint-Jean-du-Ligue, fondée en 1178 par Henri II d’Angleterre en expiation du meurtre de Thomas Becket, et (découverte en 1948) l’église du Vieux-Pouzage en Vendée, déjà envahie par la mousse verte sous l’influence des vents humides de l’Atlantique.
A Mayenne, près de Laval, dans l’église de Pritz, des fresques ont été découvertes sous une couche de badigeon qui devait recouvrir toute l’abside. A l’intérieur de l’arc triomphal se trouve un beau calendrier qui appartient probablement à une période assez tardive.
A Montmorillon, sur le Gartemps, l’église Notre-Dame, à l’origine dépendance de Saint-Savin, possédait une crypte creusée dans le roc, dédiée à sainte Catherine. On y trouve des fresques, très bien conservées, représentant les fiançailles mystiques de la sainte - la Vierge Marie tenant l’enfant Jésus sur ses genoux et couronnant sainte Catherine de sa main droite. Les saintes femmes du Poitou entourent le groupe central. Devant l’arc transversal se trouvent les deux vieillards de l’Apocalypse.
L’effet général est extrêmement gracieux et séduisant par sa délicatesse sensible. L’austérité romane est abandonnée, nous sommes déjà au seuil du monde gothique.
A Loche, ville royale, la collégiale St Urs est plus intéressante pour son architecture et son magnifique portique de sculptures romanes polychromes , que pour ses peintures, dont il ne reste que peu de choses. Dans la minuscule crypte, on peut cependant voir un portrait bien conservé de saint Bryce, qui succéda à saint Martin comme évêque de Tours. Ce tableau un peu primitif, aux couleurs sobres, date de la seconde moitié du XIe siècle et constitue donc l’une des premières fresques romanes de France.
Plus au sud, à Indre, le chœur de l’église de Meobec est couvert de fresques en très bon état. On y voit un ange avec saint Joseph, un archer sur un cheval blanc, deux anges et, entre autres saints, saint Martial et saint Pierre sur un trône avec des dragons. Malgré la simplicité des couleurs (jaune, rouge et blanc sur fond clair) et le charme du dessin, l’ensemble ne donne guère une impression de grandeur. Ces peintures de la fin du XIIe siècle manquent d’homogénéité et n’ont pas de thème iconographique unifié.
En haute Garonne, à Saint-Plancart, l’église Saint-Jean-Baptiste présente un certain nombre de caractéristiques. Sur le plan architectural, c’est la seule église du sud de la France à avoir été conçue avec deux absides se faisant face. L’abside et l’absidiole de l’aile sud sont couvertes de peintures. L’abside de ce sanctuaire, situé sur une ancienne voie romaine, par laquelle les pèlerins se rendaient plus tard à Saint-Jacques-de-Compostelle, est couverte de peintures très archaïques, de style rudimentaire - l’Adoration des Mages, le Christ en majesté, la Crucifixion, l’Ascension - dont la violence des mouvements et la splendeur des costumes présentent une certaine ressemblance avec les peintures coptes de Bauit, que l’on peut voir au musée copte du Caire. L’artiste qui les a réalisées vers le milieu du XIIe siècle a peut-être déjà visité la Terre sainte et l’Égypte.
L’Apsidiola a probablement été décorée par un autre artiste, car la composition, qui montre la tête et les épaules d’Hérode à côté de celles du bourreau qui vient de décapiter Jean-Baptiste, se caractérise par une plus grande harmonie et un plus grand raffinement. Elle date apparemment du début du XIIe siècle et est beaucoup plus proche des œuvres du Roussillon catalan que de la peinture romane française.
La peinture romane en Bourgogne
La modeste chapelle du prieuré de Berze-la-Ville, que saint Hugues, abbé de Cluny de 1049 à 1109, construisit à une dizaine de kilomètres de la grande abbaye, et où il venait chercher solitude et repos, est décorée de fresques où l’influence de l’art byzantin - notamment de la peinture d’icônes - est clairement visible. Est-ce parce qu’elles sont l’œuvre d’un artiste appartenant à la tradition clunisienne et formé au Mont-Cassin que les fresques de Berze-la-Ville présentent des traits byzantins si prononcés, ou est-ce parce que l’artiste a appris son art à la cour de l’empereur Henri III?
On sait que saint Hugues entretenait des liens étroits avec ce dernier et avec la cour byzantine. Comme il n’existe pas d’œuvre comparable en France, nous sommes enclins à classer les peintures de Berze-la-Ville avec celles du monastère du Nonnberg à Salzbourg ou de l’abbaye de Prufening, qui était également clunisienne.
Quoi qu’il en soit, ces fresques n’ont pas été réalisées par un humble artisan, mais par un grand artiste utilisant un grand nombre de couleurs, riches et denses. Sur un fond bleu foncé, où se mêlent des tons cuivrés, les ornements pourpres ou garance, blancs ou orangés des vêtements des personnages contrastent avec l’ocre rouge de leur chevelure et le vert de certaines de leurs auréoles.
Autour de la mandorle du Christ en majesté, dans la demi-coupole de l’abside, nous voyons les douze apôtres, et à leurs pieds quatre saints mineurs. À gauche, saint Paul, et à droite, saint Pierre reçoit des mains du Christ un rouleau, que certaines autorités ont identifié comme un don du site sur lequel Cluny a été construit aux apôtres Pierre et Paul. Il est plus probable qu’il représente la transmission de la Loi à l’Apôtre, comme symbole de la soumission de Cluny au Saint-Siège. À gauche et à droite des fenêtres se trouvent des scènes du martyre de saint Vincent et de saint Blasius, également de très bonne qualité.
La peinture romane en Auvergne
En Auvergne, nous trouvons dans l’église de Lavodier un mur de fond couvert d’une immense fresque romane, dans laquelle l’influence byzantine est encore très forte, mais dans laquelle le caractère français est déjà reconnaissable. L’expressivité des visages et des mains, avec des ombres et des tons intermédiaires, semble anticiper l’art gothique. Ce tableau, qui représente le Christ dans une pose majestueuse donnant sa bénédiction, et en dessous la Vierge entourée des apôtres, ressemble quelque peu à un tableau de l’église de Monteran en Suisse, et date probablement du XIIe siècle.
Saint-Julien de Briud était une étape importante sur le chemin de Compostelle, et les pèlerins venaient y prier sur le tombeau de Saint-Julien. Il n’est donc pas étonnant que cette belle église, la plus grande d’Auvergne, conserve quelques fresques qui ornaient autrefois la chapelle de la galerie dédiée à saint Michel, ainsi que des fragments de décor sur certaines colonnes de la nef. Comme dans la cathédrale du Puy, les fresques de la chapelle Saint-Michel sont peintes sur un fond très sombre. Mais le sujet du mur nord, l’enfer avec ses démons terrifiants, est illustré par une fantaisie surréaliste aussi cauchemardesque que celle de Jérôme Bosch.
On retrouve ici des échos d’œuvres asiatiques, et bien qu’il faille rappeler qu’il s’agit déjà d’une œuvre gothique, dans son inspiration extravagante et dans sa facture, elle est encore typiquement romane. Les autres fragments reproduits, le maçon - l’artiste a représenté avec une liberté surprenante deux maçons et peut-être un architecte - ainsi que la tête d’un des piliers soutenant la galerie, et le renard mangeant un bouc, témoignent d’une capacité d’invention tout à fait unique à l’époque.
L’art roman français comprend également des manuscrits enluminés, des textes évangéliques et d’autres types d’enluminures, pour plus d’informations voir l’article Manuscrits enluminés romans . Cela comprend également les peintures sur panneaux et les fresques, dont beaucoup peuvent être vues dans certaines des plus anciennes cathédrales et églises de France, ainsi que dans les plus beaux musées d’art du monde.
Nous tenons à remercier Juan Aino et André Held pour le matériel utilisé dans le livre «Peinture romane».
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