Evolution de la peinture impressionniste dans le style, le pinceau et les palettes de couleurs Automatique traduire
Avec le retour de la paix en France Monet envisage de quitter l’Angleterre. Sur la suggestion de Charles Dubigny, il décide de repasser par la Hollande. Il reste dans ce pays jusqu’à la fin de l’année 1871, tant son attrait pour les ciels nacrés est grand et tant les sujets à peindre sont nombreux : le ciel immense, les villes qui s’enfoncent dans les eaux mélancoliques des canaux, les moulins avec leurs grandes ailes rouges. L’abondance et la tendresse des tons gris, la ciselure impérative des formes, l’interprétation libre et calme de ces oeuvres les rapprochent des marines peintes à Trouville en 1870.
❶ Origines et influences
❷ Histoire ancienne
❸ Impressionniste Édouard Manet
❹ Impressionniste Claude Monet
❺ Impressionnistes Renoir, Sisley, Pissarro, Degas, Cézanne
❻ Monet et Pissarro à Londres
❼ Développement de la peinture
❽ Expositions impressionnistes
❾ Regroupement
❿ Héritage de l’impressionnisme
Mais, comme le montrent «Moulins en Hollande» ou, plus encore, «Moulins à Zaandam», l’œuvre de Monet est le champ d’une lutte particulière entre l’impression et l’organisation. Sur des sujets fluides et lumineux, il impose une structure géométrique où le triangle est la figure dominante. Opacité et transparence, densité et fluidité s’opposent et se complètent comme les dernières conditions de la résolution d’une contradiction fondamentale.
Entre ces différents éléments, il établit une relation tangible et rationnelle qui les maintient en équilibre. La lumière qui enveloppe ses formes est parfois vacillante. Son interprétation, sa technique, de plus en plus libre, semble contrainte par l’influence des réalistes hollandais de ce pays, ou plus encore par la force de la campagne hollandaise.
En 1872, tous les peintres impressionnistes reviennent à Paris ou dans ses environs immédiats.
Monet s’installe à Argenteuil après son retour et y reste six ans. Sa maison, noyée dans la verdure, les arbustes et les fleurs, devient le lieu de rencontre privilégié de ses amis. Les rencontres sont débridées, animées par le charme des jeunes femmes, compagnes ou amies des artistes. La peinture n’est pas oubliée. Son rôle est grand, comme en témoigne l’anecdote d’un portrait de Camille peint par Monet en même temps que Renoir et Manet. Aujourd’hui, Monet s’élève rapidement au-dessus de tous les autres.
Si, dans les années d’avant-guerre, le mouvement qu’ils mènent ensemble trouve ses premiers fruits majeurs dans l’œuvre de Manet, il se cristallise désormais autour de Monet. Sa personnalité attachante s’impose aux autres artistes, et ils sont frappés par l’énergie avec laquelle il poursuit ses objectifs malgré les obstacles et les malheurs que lui réserve le destin. Une étrange puissance apparaît en lui, due principalement à sa propre confiance en lui et à une capacité de persuasion. Sa première conquête est Manet.
Jusqu’alors hésitant et même réfractaire aux sollicitations et à l’exemple de Berthe Morisot, dont la charmante personnalité le séduit, Manet décide de peindre à la manière du «plein air». Presque dès les premiers instants, comme le montre son tableau «Claude Monet dans son atelier», Manet plonge ses formes dans les scintillements et les vibrations de la lumière. Évitant le contour net, il réussit à créer avec une magnifique aisance une atmosphère étincelante de lumière, essentiellement colorée.
Manet, venu en vacances à Gennevilliers, n’a qu’à traverser la rivière pour rejoindre Monet. Il représente son ami dans le pittoresque atelier flottant que Monet utilise sur la Seine, comme le fit jadis Dubigny. Il s’agit d’une immense barque sur laquelle le peintre, à l’ombre d’un auvent tendu devant la cabane sous laquelle s’installent parfois sa femme et ses amis, peut travailler tranquillement au bord de l’eau. Se déplaçant entre les berges, sous les arches reflétant le miroitement de l’eau, Monet se sentait au centre même de ce monde de formes fluides dont il cherchait à saisir l’évolution sous le mouvement tournant du soleil.
C’est sans doute à cette époque qu’il rencontre un jeune voisin passionné de bateaux et de peinture, Gustave Caillebotte, qui hérite en 1873 d’une fortune lui permettant de réaliser son goût pour l’art. Entré à l’École des Beaux-Arts dans la classe de Bonn, il la quitte au bout de quelque temps pour travailler avec Monet et Renoir, qui deviennent ses amis. Il commence à acheter les œuvres qui lui plaisent et constitue en quelques années une importante collection d’impressionnistes, qu’il entend léguer à l’État pour les musées du futur. Par son caractère noble et généreux et le sérieux de ses convictions, il ressemble à Basile, dont il a assumé le rôle de mécène.
La pensée de Monet est riche et complexe, ses motivations toujours conscientes. De 1872 à 1874, il utilise des taches inégales, très espacées, comme dans le tableau «Bateau de plaisance», ou des touches audacieusement posées d’une main libre et sensible, comme dans le tableau «Régates dans l’obscurité à Argenteuil».
En 1872, au Havre, il peint « Impression au Soleil Levant», exécuté de manière extrêmement spontanée et fluide. Ces toiles, qui annoncent le baptême du mouvement lors de la première exposition du groupe, déterminent le destin de Monet. Dans une transcription rapide de la sensation, Monet dépouille la forme de tout poids. Il concentre son attention sur les variations de lumière, qui deviennent alors la réalité inimitable des choses, le moyen idéal de reproduire l’image qu’il a vue.
Enfin, en 1873, toujours avec Renoir, il peint «L’étang aux canards» dans le quartier d’Argenteuil. Comme dans «Grenouiller», ils travaillent à nouveau ensemble sur le même sujet. Ensemble, ils étudient les tonalités, ne ménageant pas leurs efforts pour en saisir la moindre nuance. Pour représenter le chatoiement des feuillages et le scintillement de l’eau d’un étang, ils utilisent un trait à la virgule près qui leur permet de noter chaque éclat de couleur, chaque changement de lumière, et de répandre la résonance lumineuse sur toute la surface. Pour en savoir plus, voir : Caractéristiques de la peinture impressionniste 1870-1910
Ces tableaux de Renoir et Monet, peints ensemble, portent la marque d’un travail désespéré et d’une tension mentale extraordinaire. Comme on le dit couramment dans les milieux artistiques, ils sont «fatigués». Les changements successifs de pensée, les corrections et les ajustements de pigments laissent une impression de lourdeur. Peut-être Monet s’en souviendra-t-il plus tard lorsqu’il reprendra en atelier sa célèbre série des cathédrales. Comprenant qu’on lui reproche d’estomper la forme dans la lumière, il parvient à trouver avec une pâte épaisse et granuleuse l’équivalent de la densité de la matière. Les effets de la lumière glissent dessus. L’objet devient poreux et s’apparente à un écran ; et s’il n’affiche pas véritablement son poids, il acquiert une présence physique.
Au cours de l’été 1874, les processus créatifs de Monet s’accélèrent. Son activité atteint un niveau presque fiévreux. Une période courte, mais très importante pour sa peinture. Dans une série de toiles pleines de fraîcheur («Pont d’Argenteuil», «Pont de chemin de fer à Argenteuil», «Seine à Argenteuil», «Voiliers à Argenteuil»), il part à la recherche de reflets et d’ondulations sur l’eau, d’éclats de lumière. Variant sa technique, faisant des touches vigoureuses, puis larges, puis pointues, puis en forme de grandes ou petites virgules, décomposant les tons et faisant jaillir les tons locaux, maximisant l’utilisation de l’espace et brisant les masses et les surfaces, il observe le phénomène de la lumière et ses multiples facettes.
Mais derrière la facilité et l’élégance de l’effet qu’il crée se cache une question plus sérieuse. Si l’on considère l’expérience dans son ensemble, elle montre que Monet n’a pas tant saisi l’éphémère, comme on le dit communément, qu’exprimé la durée, la durée développée, la dynamique qui se réalise dans l’expérience de la sensation. Ainsi, comme le dit très justement René Berger, les impressionnistes abordent le monde «dans un processus de développement».
Voir aussi le meilleur défenseur de l’impressionnisme : le marchand d’art Paul Durand-Durel .
Renoir : accent sur les figures et les paysages
Ce rapprochement entre Renoir et Monet à deux moments cruciaux montre le rôle joué par Renoir dans le développement de la technique impressionniste. Si Monet reste le père fondateur du groupe, celui qui a fait aboutir l’idée, il est juste de considérer au passage le rôle que Renoir a joué au niveau de la recherche explicite ainsi que de la recherche des moyens nécessaires pour communiquer des sensations à d’autres par le biais de la peinture.
Son œuvre est toujours marquée par la recherche d’unité que lui dicte sa palette et l’utilisation systématique d’augmentations. A partir de 1872, alors que son traitement devient déjà minutieux, comme dans le tableau «Pont Neuf» de la collection Marshall Field à New York, où les petites silhouettes ont la clarté de l’émail, la lumière fait vibrer les couleurs et l’ensemble de l’œuvre est plongé dans une harmonie générale bleutée.
Dans son travail à Argenteuil, Renoir emprunte à Monet sa touche allongée qui patine merveilleusement l’eau, mais pour les formes végétales, il utilise une touche très fine et dense, créant une impression d’exubérance. C’est là que Monet devient un apprenti. Les mélanges mousseux de blanc et de couleur claire illuminent et animent la masse de verdure, lui apportant une sorte de magie florale. Monet crée les effets les plus insolites en propageant des taches rouges de coquelicots (et, un peu plus tard, des drapeaux rouges sur les rues pavées de ses paysages urbains).
Monet est irrémédiablement plongé dans les spectacles naturels, qui lui offrent un champ d’action infiniment plus riche, où les personnages n’apparaissent plus que comme de maigres silhouettes, à peine esquissées, et leurs vêtements ou leurs parapluies comme de véritables pièges à lumière. Renoir, au contraire, reste attentif au volume et à la densité, passionnément amoureux de la forme humaine, qu’il peigne des portraits de ses amis, ou qu’il peigne les visages et les figures de ses chères femmes avec un plaisir visible et une saine joie sensuelle.
Il n’est guère question de psychologie, cependant, si ce n’est dans le «Portrait de Choque», exécuté avec une grâce technique qui traduit sans doute une rare intimité mentale. Le plus souvent, que ce soit par respect pour la personnalité de son interlocuteur, Renoir ne va pas au delà de la surface de son modèle, visant simplement à donner une image qui montre l’apparence sensuelle et le plaisir qu’il éprouve à la contempler. Le visage ou le corps est pour lui un effet solide de volumes, d’abondance, créant une certaine image de bien-être. Les tons chair accentués par les taches sombres des yeux et des sourcils, les cheveux ambrés acquièrent un charme presque impersonnel, préfigurant déjà les créatures mythiques des dernières œuvres de l’artiste.
Dans ses compositions de 1875 et 1876, il fait un usage très original de la figure humaine comme sujet faisant partie du paysage, sur lequel la lumière peut jouer avec beaucoup de richesse et d’imagination. A cette époque, Renoir possède un vaste jardin dans la rue Cortot à Montmartre, où il peint en plein air.
Comme Toulouse-Lautrec dix ans plus tard dans le jardin de la Forêt aînée, il prend pour modèles des fleuristes et des couturières du quartier avec leurs compagnes et leurs amis. Dans la pénombre bleutée, la lumière apparaît sous forme de grandes taches rondes, légèrement rosées, posées indifféremment sur les visages et les vêtements et créant une fantasmagorie de couleurs, notamment sur les charmantes robes aux bustes ornés de rayures et de rubans.
C’est dans cet esprit que sont écrits «L’Equilibriste» et la grande composition «Danse au Moulin de la Galette», dans laquelle il montre pour la première fois les aspects diurnes de ce célèbre établissement de danse, dont l’atmosphère nocturne inspirera plus tard si profondément Toulouse-Lautrec. Renoir divise ses croquis en sections, puis, lorsqu’il peint une oeuvre, n’hésite pas à reporter plusieurs fois la toile entière à l’endroit de ce qu’il est en train de peindre. Il ne s’agit pas d’une vérification au sens propre du terme, car il s’agit d’une composition très complexe, d’une combinaison imaginaire de groupes observés séparément. De même, le système d’éclairage qu’il a mis au point crée une sorte d’illusion de la couleur, combinant des masses alternées et fusionnées exprimant l’ombre et la lumière dans un tachisme large et volumineux selon les lois de la complémentarité. C’est l’une des œuvres les plus réussies de Renoir, l’une des plus rythmées et spiritualisées de l’histoire de l’impressionnisme.
Sisley, Pissarro et Cézanne
Dans ces années, le rôle de Pissarro n’est guère moindre que celui de Monet. Laissant ce dernier régner sur les eaux, il devient le peintre de la terre ainsi que d’une sorte de vie urbaine unanime. De retour à Louveciennes en 1871, Pissarro s’installe bientôt dans les environs de Pontoise, où il reste jusqu’en 1884. Il revient à une vie simple de villageois, s’inspirant des paysages environnants, mais gardant un contact étroit avec ses camarades, se rendant régulièrement à Paris pour assister à leurs réunions.
Ces premiers paysages de Louveciennes et des villages voisins sont encore proches de ceux qu’il peint en 1870. Ce sont des routes vues en pied dans une perspective linéaire simple, se prolongeant à l’horizon, bordées d’arbres aux troncs hauts et minces surmontés d’un léger fouillis de feuilles et de branches.
Pendant un certain temps Sisley, installé lui aussi à Louveciennes puis au Port-Marly, où il restera jusqu’en 1877, peint dans le même esprit. A titre d’exemple, on peut comparer son «Chemin de la route de Sèvres» (1873) et l’Entrée de village» de Pissarro «(1872). Même allée d’arbres élancés, mêmes feuillages et branches clairs, même harmonie lumineuse, mêmes taches claires. Pissarro est plus ferme et virtuose, plus sûr de lui dans ses petites silhouettes animées de couleurs vives. Sisley est plus poétique, un peu perdu devant l’immensité du ciel, il est aussi attiré par la magie de l’eau.
Après ce moment de conjonction parfaite (le collectionneur Ernest May a pu placer avec beaucoup de succès trois œuvres contemporaines de Pissarro, Sisley et Monet dans le triptyque), les démarches des deux artistes divergent. Sisley poursuit son travail avec ténacité, mais aussi avec une certaine nonchalance qui donne à ses thèmes plus de couleurs que de profondeur.
Homme simple, modeste, timide et doux, il s’abandonne aux nuances du ciel et de l’eau. Sa peinture reste très plate et se développe lentement, couvrant de vastes paysages dont il doit saisir tous les détails pour créer une harmonie, un ordonnancement subtil de la priorité des éléments - terre, mer et ciel - qu’il combine simplement et naturellement sur sa toile. Sa peinture reste essentiellement une «peau», avec des signes de charme exquis et des nacres parfois trop insistantes.
Ainsi en est-il de ses paysages des bords de Seine jusqu’à la fameuse «Inondation du Port-Marly», où, malgré la gravité du sujet, le drame du ciel et le long clapotis de l’eau boueuse, tout vibre dans une lumière sombre diluée par quelques notes lumineuses : ainsi son toit bleu sous un ciel maussade.
Pissarro, au contraire, ayant acquis une pleine connaissance des paysages environnants, est capable d’en extraire des parties importantes et de les utiliser pour des thèmes individuels (Degas a suivi le même procédé dans ses interprétations de personnages humains réduits à leurs gestes essentiels). Pissarro donne ainsi aux impressions les plus légères un ton ferme et même épique, élargissant leur registre.
Il donne une grandeur particulière à la vie villageoise, aux jardins, aux vergers et aux personnages qui s’y trouvent. Il ne craint pas d’empiler sur la toile des signes conventionnels qui lui donnent une certaine ampleur uniforme, mais il atténue la massivité de ses bâtiments en les plaçant dans l’espace, derrière un massif d’arbres ou des jardins lumineux, ce qui atténue aussi leur monotonie. Son architecture, aux couleurs majestueuses, acquiert une grande luminosité, apparaissant derrière ces arabesques légères. Sa composition est toujours très dense et pleine, parfois sans coin de ciel ou presque, mais avec des trouées de plus en plus lumineuses. Les couleurs sont granuleuses, un peu ternes, et les couleurs sont teintées de blanc.
Le rôle de Pissarro dans la vie humaine est important. Il avait un génie pédagogique particulier. L’impressionniste américaine Mary Cassatt a dit : «Il était un tel professeur qu’il pouvait enseigner aux pierres comment peindre correctement». Il croit en ceux de ses camarades qui ont le plus de mal à s’exprimer et que les autres fuient, Cézanne et Guillaumin, et fait tout ce qu’il peut pour les aider à surmonter leurs difficultés. Il les encourage à trouver leur propre style : Guillon à allonger ses touches en flots de couleurs vives, préfigurant le fauvisme ; Cézanne à peindre en larges aplats construits, qu’il leur apprend à éclairer. Ses amis en ont toujours été parfaitement conscients. «Pissarro était modeste et colossal, un peu comme Dieu».
En lui rendant hommage, Cézanne, se souvenait sans doute des mois de 1872 et 1873 où il travaillait à Pontoise sous la direction de son ami, à côté duquel il était en quelque sorte retourné à ses études. De cette solitude de travail, son œuvre sort transformée. Pissarro avait depuis longtemps reconnu les immenses dons de Cézanne.
La confiance qu’il lui accorde incite l’Aixois rancunier à oublier sa manière dramatique et sombre, ses prédilections allégoriques et littéraires pour se consacrer à la peinture pure. Très modestement, Cézanne commence par poser devant lui une toile de Pissarro et à en faire une copie très fidèle. Cela lui permet non seulement de maîtriser la nouvelle technique d’application de la couleur par petites touches, les taches, mais aussi de pénétrer profondément dans le mystère du relief. Il découvre que la tension peut être exprimée sans recourir à la netteté.
Son caractère, plus enclin à la méditation qu’à l’invention, trouve dans la contemplation de la nature une paix inépuisable et un point de départ. Cette longue collaboration, qui dura près de deux ans, fut très fructueuse pour les deux amis. Chacun a exercé sur l’autre une profonde influence, que tous deux sont heureux de reconnaître. S’en souvenant, certains historiens ne craignent pas d’utiliser le terme «de mutation» à propos de l’œuvre du peintre aixois. Cézanne, conscient de sa dette à l’égard de Pissarro, déclare même : «Peut-être sommes-nous tous des produits de Pissarro». Ce dernier, à son tour, adopte le sens du monumental de son compagnon.
Cézanne utilise cette expérience à Auvers-sur-Oise, où il est venu séjourner fin 1873 avec le docteur Gachet (immortalisé plus tard dans les portraits de Van Gogh ). Comme en témoignent «la maison du Dr Gachet» et surtout le célèbre «Aleson du Pendue» à Auvers-sur-Oise, l’atmosphère d’Auvers, alors petit village rural, l’amabilité et la courtoisie de son hôte, qui fut aussi son confident et son premier collectionneur, lui permirent de se consacrer pleinement à son travail.
Devant la nature, il abandonne le traitement vivant, lourd et souvent opaque, parvient à une scrupuleuse fidélité d’observation et procède à la transmission de toutes les nuances de la couleur. Il se sent le cœur plus léger, trouve une forme de travail plus régulière, la couleur s’éclaircit, les pinceaux deviennent très nets et bien répartis.
Cependant, il doit souvent revoir son travail et les toiles sont recouvertes de couches successives. Cet effort d’exécution rend parfois l’œuvre un peu lourde, mais ne change jamais le rythme nouveau de la composition. La peinture prend un aspect granuleux, mais la palette est certainement allégée. A partir de là, il peut poursuivre sa fabuleuse tentative de reconstruction du monde.
Degas : une étude systématique
A cette époque, chacun des artistes a trouvé sa propre voie. Edgar Degas après un voyage à la Nouvelle-Orléans, qui le rend sensible à l’exotisme de la vie coloniale, se passionne enfin pour les mécanismes de la vie quotidienne et en entreprend l’étude systématique. Toute son attention se porte sur le monde de la danse observé dans les coulisses de l’Opéra, le monde des blanchisseuses ou l’hippodrome.
Malgré son étrange individualité, son particularisme, Degas ne peut être séparé de ses amis, comme on le fait souvent. Ses méthodes sont différentes : il craint le plein air et insiste sur les droits de l’imagination, mais c’est pour mieux saisir les traits du sujet et les préserver de tout changement visible. Il se montre dans la réalité comme un observateur fidèle, voire un maniaque de la réalité ; il ne l’embellit qu’au gré de sa vision. Son œil est vif et sa mémoire si entraînée qu’il parvient à restituer le sujet dans toute sa tension, accompagné d’une atmosphère et d’une lumière exceptionnellement riches en couleurs. Même lorsqu’il travaille en studio à partir de dessins et d’esquisses accompagnés de notes écrites très détaillées, c’est peut-être ce qui donne le mieux l’impression qu’il a capturé la vie palpitant dans la fluidité la plus délicate. Il utilise un éclairage direct et fort de la scène, mais le plus souvent en contraste avec des ombres, des demi-teintes et des éclairages indéterminés, dans le seul but de créer des gammes d’intensités très différentes.
Artiste de la scène, du spectacle sous les projecteurs, il privilégie les exercices, les répétitions, les pièces où le sens de l’art se révèle dans le travail quotidien. Ses figures, jamais statiques, sont saisies dans leur état le plus mobile, ou mieux, dans la préparation d’un geste ou dans un état de suspension, comme une danseuse à l’écoute de sa réplique, un cheval rassemblant ses forces avant de s’élancer dans une course.
Empruntées à l’Extrême-Orient, les différentes techniques de mise en page, la vue de dessus, la diagonale donnent à Degas l’occasion de créer des variations saisissantes d’un même sujet. Mais en cherchant à grossir, en donnant de l’importance à un détail curieux ou intéressant, qui devient à son tour un microcosme, un condensé des sens, il en arrive à une sorte de dépersonnalisation de l’objet, qui s’abolit peu à peu, réduit à ses fonctions de base et à ses habitudes caractéristiques.
Sa technique n’est pas moins remarquable. Les couleurs se dissolvent en nuages poudreux et lumineux, l’espace entre les figures acquiert une vivacité indéfinissable. Il utilise d’abord le pastel qui, mélangé à de la gouache, humectée de vapeur d’eau bouillante et posée et fixée couche par couche, donne une matière d’une saturation éblouissante et nacrée.
Goncourt, qui visite son atelier en 1874, décrit Degas comme morbide et névrosé et ne voit dans ses études que le résultat des problèmes qu’il commence à éprouver avec ses yeux (un peu comme certains ont tenté d’expliquer la déformation des formes pratiquée par le Greco).
En réalité, Degas avait un esprit agité et impressionnable, n’était jamais satisfait des résultats de son travail et menait des expériences réfléchies et très érudites. Il développe une véritable chimie des couleurs. Détestant farouchement l’homme, il étudie avec le détachement d’un enthymologiste la machine humaine, démontée dans ses parties les plus élémentaires et les plus intimes. Ici et là, dans l’un ou l’autre domaine, après 1872, il fait un certain nombre de découvertes majeures.
Voir le marchand d’art et chantre de l’impressionnisme Paul Durand-Ruel .
Nous remercions Jacques Lassagne pour l’utilisation d’un extrait de «L’impressionnisme» (1966).
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