Expositions impressionnistes à Paris (1874-82): histoire de l’impressionnisme français Automatique traduire
Après son retour en France en 1871, le marchand d’art et galeriste Paul Durand-Ruel s’intéresse aux nouveaux représentants de l’impressionnisme . Continuant à soutenir les peintres de Barbizon et Courbet, alors gravement odieux en raison de sa participation à «la Commune», il découvre Sisley et Degas, qui lui sont offerts par Monet et Pissarro. Par ailleurs, après avoir admiré des tableaux de Manet dans l’atelier de Stevens, il rend visite à l’artiste et acquiert en une seule transaction vingt-trois tableaux d’une valeur de 35 000 francs. Il présente ses acquisitions lors d’expositions qu’il organise à Londres. En 1873, il fait la connaissance de Renoir.
Ces achats massifs, qu’il ne peut malheureusement pas maintenir faute d’un nombre suffisant de collectionneurs français, apportent non seulement une aide matérielle aux artistes mais leur redonnent le moral. Il leur prouve que la solution à leurs problèmes ne se trouve pas dans les expositions officielles, auxquelles Manet et Renoir restent cependant attachés.
❶ Origines et influence
❷ Histoire ancienne
❸ Impressionniste Édouard Manet
❹ Impressionniste Claude Monet
❺ Impressionnistes Renoir, Sisley, Pissarro, Degas, Cézanne
❻ Monet et Pissarro à Londres
❼ Développement de la peinture impressionniste
❽ Expositions impressionnistes
❾ Scission du groupe
❿ Héritage
Ainsi, les membres du groupe impressionniste se sentent suffisamment confiants dans leur technique et dans leurs convictions pour décider de se lancer dans un grand pari. Après avoir essuyé les mêmes rebuffades de la part du jury du Salon, ils pensent pouvoir s’adresser directement au public et recueillir son avis, d’autant plus qu’ils ont obtenu un certain succès. Les activités de Durand-Ruel, les prix auxquels certaines de leurs œuvres se vendent en vente publique à Paris, leur font penser que le moment est venu d’organiser cette exposition et de faire un pas décisif.
L’accueil réservé réservé au Salon de 1873 au tableau de Manet «Bon Boc» a déterminé leur opinion. Ils considèrent l’œuvre, où l’on retrouve trop de Franz Hals, que Manet avait admiré lors de ses voyages en Hollande, comme une concession et un recul par rapport à ce qu’ils ont développé depuis dix ans. Ne voulant pas payer un tel prix d’entrée au Salon, ils veulent faire de l’exposition une manifestation révolutionnaire.
Dans son article, Paul Alexis défend l’idée d’une société artistique qui pourrait organiser des expositions indépendantes. Pissarro avait toujours souhaité une association professionnelle qui permettrait aux artistes eux-mêmes de défendre leurs intérêts. Monet, qui, dès 1867, avait nourri avec Basile l’idée d’organiser une exposition des jeunes peintres impressionnistes, prend la direction de la nouvelle entreprise.
Après de longues discussions, il est décidé que l’exposition doit avoir une orientation esthétique et se limiter à des artistes ayant fait leurs preuves. L’idée de Cézanne est que l’exposition doit présenter les œuvres les plus marquantes pour faire impression. Cependant, sur les conseils de Degas, qui ne veut pas que l’exposition ressemble à celle d’un groupe de marginaux, la majorité penche pour un point de vue plus conciliant. Degas pense que le public acceptera plus facilement l’exposition si des artistes de différentes disciplines y participent. Il est même difficile de se mettre d’accord sur le titre de l’exposition. Dans ces conditions, l’idée d’un nom militant doit être abandonnée et, en désespoir de cause, il opte pour «la Société coopérative des artistes, peintres, sculpteurs, graveurs, etc.», ce qui ne changea pas grand-chose.
Première exposition impressionniste (1874)
L’exposition s’ouvre le 15 avril 1874 pour un mois dans l’atelier nouvellement libéré du photographe Nadar, au premier étage du 35 boulevard des Capucines, à l’angle de la rue Danu, qu’il a bien voulu leur prêter. L’exposition comprenait plus de 200 œuvres, dont 51 appartenaient aux membres du groupe et 114 à d’autres artistes invités, pour la plupart des amis de Degas.
Trente personnes participent à l’exposition, dont seul Boudin représente l’ancienne génération. Manet refuse de se joindre à ses amis, malgré l’insistance de Degas. Monet présente cinq toiles et sept esquisses ; Renoir six toiles, dont «Boîte» et «Danseuse» ; Cézanne «Nouvelle Olympie» et deux paysages d’Auvers, dont «Maison Pendue» ; Berthe Morisot, neuf peintures, aquarelles et pastels ; Degas dix peintures, pastels ou dessins représentant des danseuses et des courses de chevaux ; Pissarro et Sisley cinq paysages chacun. Pissarro a dû se battre pour obtenir l’inscription de Cézanne et de Guillaumin.
Dès le départ, l’exposition connaît un succès mérité, mais surtout auprès d’un public prêt à en rire. Un peu comme dans le Salon des Refusés ! Les critiques d’art viennent, mais ils ne prennent rien au sérieux, ils ne comprennent pas ce à quoi le nouveau style de peinture aspire et aboutit. Mais ils apprécient la rupture avec la peinture traditionnelle. Le 25 avril, une bombe éclate sous la forme d’un article du Charivari dans lequel Louis Leroy le met en pièces.
Mais à l’occasion de l’exposition, le groupe se dote au moins d’un nom, que les artistes finissent par accepter, même s’ils n’en sont pas satisfaits car, comme tous les noms, ils le considèrent comme incomplet et n’exprimant pas toute la signification de leur but. Degas, quant à lui, n’a jamais accepté le titre, préférant le titre «à l’indépendant». Zola ne voulait entendre parler que de naturalistes. Mais l’histoire a fini par confirmer le mot, dont Monet est devenu le parrain involontaire :
«- On m’a demandé de donner un titre au catalogue, j’ai répondu : «Impressions». Le tableau s’appelait «Impression, Soleil Levant» («Impression, Sunrise»). Ainsi est né le nom «Impressionnisme» ’.
Comme c’est souvent le cas, un terme né par dérision finit par prendre un sens tout à fait digne. Quelques années plus tard, les plus grands défenseurs du groupe, Théodore Duret et Georges Rivière, adoptent le nom «Impressionnistes» et le rendent célèbre. «C’est le traitement du sujet par les tons plutôt que le sujet lui-même qui distingue les impressionnistes des autres peintres», écrit Georges Rivière en 1877. Enfin, le mot convenait bien à cette peinture directe qui obéit au sentiment, qui n’est pas le réalisme, mais qui montre la nature vue avec modération et sous une certaine lumière.
Cependant, l’exposition se solde par une telle perte que les artistes sont contraints de dissoudre la troupe nouvellement formée, chacun payant sa part des pertes. La situation s’aggrave et Renoir persuade ses amis d’organiser une vente publique à l’hôtel «Drouot». Elle eut lieu le 24 mars 1875, Bertie rédigeant la préface du catalogue et Durand-Ruel faisant office d’expert.
Soixante-treize œuvres sont vendues aux enchères : vingt-et-une de Sisley, vingt de Monet, vingt de Renoir et douze de Berthe Morisot . Les ventes sont difficiles, souvent interrompues par des manifestations, et les prix sont très bas. En moyenne, un tableau n’est pas payé plus de 100 francs. Mais cette fois, les impressionnistes ont un nouveau soutien : Victor Choquet, inspecteur des douanes, collectionneur modeste mais passionné, qui favorise d’abord Renoir puis, grâce à l’amitié active de ce dernier, Monet et Cézanne.
Choquet a contribué à défendre les impressionnistes, ainsi que Gustave Caillebotte, lors de leurs expositions ultérieures. Après sa mort, une vente organisée par sa veuve en 1899 permit de vendre trente-deux tableaux de Cézanne, onze de Monet, onze de Renoir, cinq de Manet et un de Pissarro et de Sisley. Pour plus d’informations, voir : Les meilleurs tableaux impressionnistes .
Pour des expositions impressionnistes de même envergure en Australie, voir École de Heidelberg (c. 1886-1900) Impressionnisme australien .
Deuxième exposition impressionniste (1876)
En 1876, le groupe décide d’organiser une seconde exposition, cette fois à la galerie Durand-Ruel, 11 rue Le Peletier. Pas plus d’une vingtaine d’artistes y participent, présentant un total de 252 œuvres. Chaque artiste expose séparément : Degas avec vingt-quatre tableaux, Monet avec dix-huit, Berthe Morisot avec dix-sept, Pissarro avec douze, Renoir avec quinze et Sisley avec huit.
Beaucoup d’œuvres ont été fournies par des collectionneurs, dont Choquet et le baryton Faure, qui a acheté les tableaux de Monet sur les conseils de Durand-Ruel. Choquet est présent tous les jours, essayant d’expliquer aux visiteurs la valeur des œuvres de ses amis. Ni Guyon ni Cézanne, qui vivent alors dans le Midi, n’exposent, mais il y a quelques nouveaux venus : Caibotte, Desboutin et Legro.
Le public est moins nombreux que lors de la première exposition et les critiques ne sont pas meilleures. C’est à propos de cette exposition que le critique Albert Wolf écrit un article stupide dans Le Figaro «» qui, malheureusement pour lui, sauve son nom de l’oubli, et qui contient ces mots : «La rue Le Peletier n’a pas eu de chance. Après l’incendie de l’Opéra, un nouveau malheur s’est abattu sur le quartier…»
Mais il y a aussi des aspects positifs. Parmi ceux-ci, on peut citer le pamphlet de Duranty «La nouvelle peinture», qui exprime des réserves inspirées par Degas et fort malheureuses pour les autres peintres, mais qui contient néanmoins quelques définitions remarquables : «D’intuition en intuition, ils parvinrent peu à peu à décomposer la lumière solaire en ses rayons et ses éléments et à en réunir l’unité par l’harmonie générale des irisations qui se répandaient sur leurs toiles.
Du point de vue de la délicatesse de l’œuvre et de la pénétration subtile des couleurs, il s’agit d’un résultat tout à fait inhabituel. Le physicien le plus érudit ne pourrait pas leur reprocher d’analyser la lumière». Duranty conclut en se demandant si ces artistes ne sont pas les pionniers d’un grand mouvement de renouveau artistique. Pour en savoir plus, voir : Caractéristiques de la peinture impressionniste 1870-1910
La troisième exposition impressionniste (1877)
La troisième exposition a lieu en avril 1877 dans un appartement vide que Caillebotte a loué pour l’occasion au 6 rue Le Peletier. C’est lui qui est le protagoniste du projet qui, malgré l’opposition de Degas, s’appelle cette fois hardiment «l’Exposition impressionniste», et qui devient la plus importante de toutes les expositions du groupe.
L’exposition présente 230 œuvres de dix-huit artistes. Monet expose trente-cinq tableaux, dont plusieurs représentant la gare Saint-Lazare, grâce à ses collectionneurs Hoched et le docteur roumain Bellio (qui achète le tableau «Impression : le ballon du Levant»). Pissarro présente vingt-trois paysages d’Auvers et de Pontoise, qu’il place dans des cadres blancs à l’instar de Whistler, estimant qu’ils seront ainsi mieux mis en valeur. La contribution de Renoir - «Danse au Moulin de la Galette», «Swing», portraits de Madame Charpentier, Jeanne Samarie et Madame Daudet - est particulièrement importante.
Mais la révélation, ce sont les portraits de Sisley et de Cézanne. Le premier, qui vient de peindre la série «Inondation à Marly», présente dix-sept paysages. Le second, si méconnu et jusqu’alors méprisé, reçoit un véritable hommage de la part de ses camarades. Un mur de la salle centrale était consacré à l’ensemble de ses peintures (natures mortes, paysages, portrait de Schocke) et aquarelles.
Dans une galerie séparée, Degas expose vingt-cinq peintures et pastels, scènes de café-concert, danseuses et femmes à la toilette. Pendant l’exposition, Georges Rivière publie cinq numéros de «L’Impressionniste, revue d’art». Mais malgré tous ces efforts, le public, pourtant plus nombreux, reste indifférent. La vente à la fin de l’exposition ne donne que des résultats médiocres.
C’est ainsi qu’en quelques années le groupe trouve son nom. D’abord encombré de futilités, il voit émerger des artistes qui, les premiers, se regroupent pour trouver et définir une nouvelle méthode d’incarnation du regard moderne. Par la quantité et la qualité de leur travail, ils ont donné au mouvement toute sa signification. Mais ils n’ont réussi à s’imposer ni en tant que groupe, ni en tant que succès commercial ou économique.
Cet échec semble montrer que Degas avait raison de toujours recommander une exposition sans la doctrine selon laquelle les mouvements les plus divers pouvaient s’unir sur le seul critère de la qualité (en cela il était souvent très injuste, ne se rendant pas compte que les autres ne partageaient pas ses goûts et ses dégoûts).
D’autre part, les fondateurs du groupe, ceux qui y voient une communauté de pensée et de technique, sont tentés de se séparer à nouveau et de tenter leur chance, soit auprès de divers marchands d’art (car Durand-Ruel a désormais plusieurs concurrents qui tentent de débaucher ses artistes), soit même en retournant au Salon, comme l’avait fait Manet. Ainsi, le mouvement impressionniste naissant, au moment où il avait établi sa présence et son unité, était en fait au bord d’une grave crise et d’une désintégration.
L’activité impressionniste à Paris
Les discussions théoriques reprennent de l’importance. Elles se déroulent cette fois dans un café choisi par Desboutin - «La Nouvelle Athènes» sur la place Pigalle près du cirque Fernando. Degas y apparaît en pionnier incontesté, entouré de son cercle d’amis écrivains et artistes. Manet est là aussi, un peu déçu et se souvenant parfois que ses explorations étaient des premières.
Renoir, qui peint alors ses plus belles toiles parisiennes, s’arrête à proximité. Pissarro s’y arrête lors de ses rares visites à Paris. Monet et Sisley sont absents. Les élans de Cézanne, toujours incompréhensibles malgré l’évolution de sa peinture, restent bouillants et passionnés.
George Moore se souvient que la porte du café s’ouvrait sur le sable à l’apparition de Manet et de son élégance très fashion, que les tables aux plateaux de marbre étaient généralement disposées derrière une cloison à quelques centimètres au-dessus des chapeaux des hommes, que les discussions se déroulaient au clair de lune sur la place Pigalle et dans les ombres épaisses des maisons.
Manet peint plusieurs fois son jeune ami avant que n’apparaisse le célèbre pastel de 1879 (Metropolitan Museum of Art, New York), d’un dessin époustouflant et d’une exécution si souple qu’elle semble instantanée. C’est avec la même aisance, obtenue par des hachures rapides, qu’il peint des vues de Paris, notamment de la rue Mosnier, où il a un atelier, qui sont sans doute son rapport le plus direct à l’impressionnisme.
Il est intéressant de comparer ces oeuvres légères, exécutées en perspective frontale et peu profonde, avec la tentative parallèle de Monet de représenter la rue Montorgueil décorée de drapeaux en 1878, toujours à l’occasion de l’Exposition Universelle (Musée de Rouen). L’œuvre donne l’impression d’un flot de souvenirs : la composition est organisée sous forme de diagonales tournantes, la couleur rouge des drapeaux met en valeur les façades des immeubles aux fenêtres allongées, et la foule grouillante est rendue dans la couleur verte dominante. Ce thème sera repris exactement par Van Gogh, puis par les Fauves .
Entre 1876 et 1878, Monet peint également le plus beau de ses tableaux d’atmosphère, consacré à la gare Saint-Lazare et au pont de l’Europe, d’où émergent les voies ferrées. Le modernisme du thème, qui a également inspiré Turner et Pissarro lorsqu’il était en Angleterre, passe rapidement au second plan : les locomotives ne sont plus que des monstres noirs indistincts dans les nuages de fumée qui les enveloppent et emportent leurs velours bleutés ou gris jusqu’à la verrière ou dans le ciel clair. Les nuages de fumée, avec leurs scintillements et leurs lumières, deviennent le thème principal et se développent, décuplant la signification des sensations qui passent au vertige.
Manet peint également une série de scènes parisiennes dont les sujets, marqués par le naturalisme de Zola et de Maupassant, sont transformés par la manière de les exécuter. Là encore, on peut parler d’abolition du thème devant l’improvisation géniale avec laquelle il traite les visages, devant la transparence bleutée et les variations de gris qui donnent un aspect fougueux aux scènes les plus lourdes. Cette série, qui commence par «Nana» (1877), passe par diverses scènes de café-concert, «Serveuse à la bière» et se termine par «Bal aux Folies-Bergère» (1881), se situe entre les grandes compositions de Renoir et ce que Toulouse-Lautrec peindra plus tard.
Le début de la dissolution des impressionnistes
L’année 1878 s’avère très difficile et le groupe ne parvient pas à organiser une nouvelle exposition. Les ventes se font de plus en plus rares. Le chanteur Faure, espérant tirer profit des tableaux qu’il a achetés, met sa collection en vente publique, mais il doit acheter lui-même la plupart des tableaux pour éviter qu’ils ne partent à la dérive. Deux mois plus tard, Hoschede, dévasté, voit sa collection vendue à des prix catastrophiques par décision de justice.
Les artistes doivent s’entraider, comme ils l’ont fait dans les moments les plus difficiles en 1868. Manet accepte de prêter à Monet une partie de l’argent rapporté par les tableaux pour que l’artiste puisse s’installer à Véteille. Caillebotte aide discrètement, comme le faisait Basile. Il a déjà acquis une collection considérable de leurs tableaux et a providentiellement fait un testament les léguant au Louvre, ce qui à cette époque est presque dérisoire. Pissarro, qui a une famille nombreuse, traverse une période très difficile.
Cependant, un nouveau collectionneur, confiseur et restaurateur, Mourer, ancien camarade de classe de Guillaumin, entre en scène, fait des achats minutieux et invite régulièrement les artistes à dîner. Sisley, qui a perdu tout espoir, décide de s’isoler pour travailler et de renoncer à toute exposition. Renoir revient au Salon où, plus chanceux que Manet, il est bien accueilli.
Cependant, l’idée de l’impressionnisme continue à se répandre et s’impose peu à peu. Duret publie une brochure «Peintres impressionnistes» avec une préface au ton vif dans laquelle il énonce «quelques bonnes vérités à l’attention du public». La partie principale de l’opuscule décrit les objectifs des artistes et ce qui les a guidés. Il les place dans la génération «naturaliste» de Corot, Courbet et Manet et insiste peut-être trop sur l’influence japonaise qu’ils ont subie. Mais dans le cas de Duret, c’est probablement justifié, car il a voyagé dans le monde entier et s’est particulièrement intéressé au Japon. Il consacre ensuite des articles détaillés à ceux qu’il considère comme les artistes les plus caractéristiques, Monet, Sisley, Pissarro, Renoir et Berthe Morisot. Dans un post-scriptum, il prédit que les œuvres de ses amis finiront au Louvre .
Quatrième exposition impressionniste (1879)
Mais la quatrième exposition, qui se tient du 10 avril au 11 mai 1879 au 28 avenue de l’Opéra, grâce au dévouement et à la persévérance de Kaibott, marque un net recul. L’influence de Degas l’emporte, comme en témoigne le retour au titre neutre : «Exposition d’un groupe d’artistes indépendants». Renoir et Sisley sont absents, de même que Cézanne, qui s’est installé en Provence. En revanche, Pissarro et Monet dominent toujours l’exposition, avec respectivement trente-huit et vingt-neuf tableaux.
Après Pissarro, c’est au tour de Paul Gauguin. L’exposition est moins attaquée et connaît un succès certain auprès du public. Elle dégage même un bénéfice qui est réparti entre les quinze participants. Dans le Salon qui se tient au même moment, la place des nouveaux artistes est très modeste. Cézanne et Sisley sont rejetés. Seul Renoir, qui expose son grand portrait de Madame Charpentier avec ses enfants et Jeanne Samarie, connaît un réel succès, sans doute en partie dû au statut social de ses sujets. Ce succès persuade Monet d’exposer le tableau au Salon suivant, ce qui entraîne une véritable rupture avec Degas, qui, furieux, abandonne son principe.
Cinquième exposition impressionniste (1880)
La cinquième exposition, ouverte en 1880 au 10 rue des Pyramides, laisse le champ libre à Degas, qui expose tous ses amis, notamment Raffaelli avec trente-cinq tableaux. De tout le groupe, il ne reste que Pissarro, Morisot, Guyon et Caibotte, rejoints par Gauguin et Vignon. Le public est cette fois moins nombreux et généralement indifférent, et l’on ne peut s’empêcher de penser que c’est parce que les impressionnistes sont minoritaires et que leur apport est dilué.
Monet présente une de ses toiles au Salon, où Manet expose «Chez le Fere Lathuile», peint en plein air. Zola, en publiant trois articles «Le naturalisme au Salon», félicite les artistes qui reviennent, estimant que c’est sur ce terrain qu’ils doivent mener leur lutte. Il note que leurs expositions ont été très profitables à Degas et en profite pour porter un jugement incomplet sur les impressionnistes, ce qui est le début de sa désillusion : «Ils restent au-dessous des œuvres qu’ils essayaient de produire, ils balbutient, ne trouvent pas les mots». La nouvelle formule, selon lui, n’a pas trouvé son génie directeur et reste dispersée dans des tentatives diverses.
Cette opinion est d’autant plus injuste qu’à partir de 1879, les artistes commencent à organiser des expositions privées où chacun peut montrer l’évolution de son travail. Dans les locaux de l’hebdomadaire artistique et littéraire «La vie moderne», édité par Charpentier, ces expositions, organisées par Edmond, le frère de Renoir, permettent au public de voir les pastels de Renoir en 1879, les peintures de Manet en avril 1880 et celles de Monet le mois suivant. Elles montrent bien que le temps est venu pour ces artistes de ne pas se cantonner dans des expositions collectives, mais de plonger dans les profondeurs qu’exige leur tempérament particulier, tout en restant fidèles à un idéal commun.
Sixième exposition impressionniste (1881)
La sixième exposition du groupe en avril 1881 montre seulement que la désunion du groupe s’est accrue. Kaibott, dans une vaine tentative de rassembler tous ceux qui ont réellement contribué à la naissance de l’impressionnisme, se retire à son tour. L’exposition, qui se tient dans la même salle Nadar du boulevard des Capucines où la première avait eu lieu en 1874, ne comprend que Pissarro, Guyon, Gauguin, Vignon, quelques esquisses de Degas, des œuvres de Berthe Morisot et de Mary Cassatt, et elle est intime. Monet, Renoir et Sisley rejoignent Manet au Salon.
La situation économique s’améliore quelque peu, Durand-Ruel reprend ses achats et commence même à verser à ses artistes de petites allocations mensuelles. Ils peuvent donc enfin travailler en paix et voyager un peu. Renoir se rend donc en Algérie, puis dans le sud de l’Italie, à Palerme, où il peint en quelques minutes un portrait de Wagner, puis Naples, Portpey et Rome, où il découvre Raphaël . Sur le chemin du retour, il s’arrête à l’Estaque pour voir Cézanne.
Mais ses idées prennent forme de telle sorte qu’il s’éloigne de l’impressionnisme. En revanche, Manet, gravement malade et condamné par ses médecins à rester à la campagne, se réfugie dans l’impressionnisme. Il est d’abord à Belleville, puis à Versailles. Il peint un jardin où la lumière joue sur des bancs de fleurs, des masses de feuillages, avec une touche vive et animée, des œuvres simples et heureuses dans lesquelles il met tout son amour de la vie.
Dès la fin de l’année 1881, Caibotte renouvelle ses tentatives pour réunir ses amis et redonner aux expositions du groupe leur caractère originel. Durand-Ruel est présent et propose de prendre en charge toutes les affaires. Après de longues négociations, qui aboutissent au départ de Degas puis de Mary Cassatt, un accord est trouvé sur la composition restreinte du groupe qui, en l’absence de Cézanne, comprend Monet, Sisley, Pissarro et Morisot, ainsi que Guyon, Caibotte, Gauguin et Vignon.
Septième exposition impressionniste (1882) : Mort d’Édouard Manet
La Septième Exposition, qui s’ouvre le 1er mars 1882 dans des locaux loués au 251 rue Saint-Honoré, est l’exposition la plus homogène jamais réalisée. Monet présente trente paysages, dont «Les Débâcles», et des natures mortes ; Renoir expose «Le Déjeuner des rameurs», qui marque la fin de sa période parisienne ; Pissarro montre des scènes de village ; Sisley est peut-être le plus important avec ses Rivières et bords de canaux.
Les prix demandés par Durand-Ruel sont élevés. Mais si l’impressionnisme n’est plus négociable, les acheteurs sont rares, et il devient nécessaire d’ouvrir progressivement le marché américain pour traduire le succès moral en succès pécuniaire. Durand-Ruel s’y emploie avec l’aide infatigable de Mary Cassatt, et une grande exposition s’ouvre à New York en 1886.
Au Salon de 1882, Manet expose «Bal aux Folies Bergères», grande toile magistrale qui synthétise, non sans une certaine mélancolie, le glamour de la vie montmartroise dont l’artiste fait partie depuis si longtemps. Il est désormais assis, immobile, dans sa maison, visité par ses belles amies dont il fait le portrait dans de charmants pastels. Au début de l’année 1883, la gangrène s’empare d’un de ses membres paralysés et, malgré l’amputation de sa jambe, il meurt le 30 avril.
A la fin de l’année, Berthe Morisot et son mari organisent une grande exposition de Manet avec une préface de Zola. En février 1884, son atelier est vendu aux enchères à un prix élevé. La disparition de Manet est perçue par tous comme une grande douleur, comme une perte irréparable.
Paradoxalement, sa mort marque la dissolution effective du groupe dont il avait suivi les expositions avec tant d’amour, mais auquel il n’avait jamais pu convaincre de participer. Mais même s’il est resté à l’écart, il faut le considérer comme un initiateur, capable de comprendre et d’assimiler les propositions les plus diverses, en se plaçant à un niveau amical, spirituel et critique utile.
Dans les dix dernières années de sa vie, il semble même avoir fait de son mieux pour rejoindre les rangs des impressionnistes et étouffer sa suprême individualité. Il est le moins dogmatique, et dans son œuvre le plus libre, spontané et jeune, simplement un parmi d’autres, sans la moindre prétention de prêcher. Il accepte sans se plaindre les quelques honneurs officiels qui lui parviennent trop tard, une récompense, un peu de respect, et regarde avec sérénité les luttes passées.
En 1886, la huitième et dernière exposition impressionniste a lieu à Paris. Dans son compte rendu de l’exposition, le critique d’art français Félix Fenon (1861-1944) invente le nom de «néo-impressionnisme» pour désigner les peintures pointillistes de Georges Seurat et d’autres.
Pour les détails de l’exposition impressionniste de Boston (1883) et de l’exposition impressionniste encore plus importante de New York (1886) organisée par le marchand parisien Paul Durand-Ruel, voir : Impressionnisme américain (vers 1880-1900).
Voir marchand d’art et défenseur de l’impressionnisme Paul Durand-Ruel, voir .
Nous remercions Jacques Lassagne pour l’utilisation d’un extrait de «L’impressionnisme» (1966).
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