Sculpture Gothique Anglaise Automatique traduire
Les grands édifices religieux anglais d’avant la Conquête appartenaient à trois types de congrégations : les cathédrales séculières telles que Wells, Salisbury et Lincoln (composées de chanoines non résidents et gouvernées par un doyen et un chapitre), les monastères (essentiellement bénédictins, cisterciens et augustins) et les monastères épiscopaux, uniques en Grande-Bretagne (un évêque avec une communauté monastique dirigée par un abbé). Durham est un exemple typique de ces derniers et possède des groupes de bâtiments séparés pour l’évêque, au nord de la cathédrale, et pour l’abbé, au sud.
La première architecture gothique anglaise
Le premier exemple d’architecture gothique en Angleterre est traditionnellement considéré comme la reconstruction de la cathédrale de Canterbury après qu’un incendie ait détruit le chœur roman en 1174. Gervais, moine et chroniqueur, a laissé un récit particulièrement détaillé de cette construction, pour laquelle l’architecte français Guillaume de Sens fut mandaté. Sa rénovation par un architecte anglais après sa chute fatale de l’échafaudage en 1178 a marqué une nouvelle branche de l’architecture gothique anglaise, combinant les nouvelles tendances de l’art chrétien du nord de la France et l’évolution nationale avec ses propres particularités régionales, une forme de l’art médiéval dominée par le rôle important de l’épiscopat et du mécénat royal. Les historiens de l’art anglais ont adopté leur propre terminologie pour le style gothique, qui date essentiellement du 19e siècle. La première architecture gothique est appelée le style Early English, pour lequel le style épiscopal a été proposé comme remplacement (Canterbury, Wells, Lincoln, Peterborough, Salisbury, Westminster). Pour les périodes ultérieures de l’art gothique, on trouve les termes Decorated Style (Exeter, York, Ely) et Perpendicular Style (Cambridge) correspondant respectivement aux styles français Rayonnant Gothic Architecture (1200-1350) et Flamboyant Gothic Architecture (1375-1500). La période qui nous intéresse ici commence vers 1150, se prolonge dans la seconde moitié du XIIe siècle et s’illustre par un passage progressif, au niveau régional, de l’architecture romane à l’architecture gothique. On y trouve de nombreuses expérimentations qui deviennent progressivement des standards au cours de la première moitié du XIIIe siècle jusqu’à l’ouverture du site de Westminster qui marque une nouvelle interprétation esthétique et culturelle au milieu du XIIIe siècle. Voir aussi : Les cathédrales gothiques pour les plus grands exemples de conception gothique en France.
Sculpture gothique anglaise primitive
La première sculpture gothique en Angleterre, en Écosse, au Pays de Galles et en Irlande, ne joue pas le même rôle de pionnier dans le développement de l’art religieux médiéval que l’architecture et indique un rejet clair du modèle représenté par les grandes façades du nord de la France. Dans la seconde moitié du XIIe siècle, la sculpture est surtout architecturale et décorative (Worcester, Winchester). Hormis le portail de Rochester, qui reprend et interprète, peu après le milieu du XIIe siècle, le type de colonnes avec statues de la façade occidentale de Chartres, aucun grand ensemble ne développe un cycle de sculpture de façade semblable aux créations françaises. Les nouveautés proviennent essentiellement du domaine de la sculpture architecturale. Ainsi, des sculptures d’une qualité exceptionnelle apparaissent au palais de Wolvesey à Winchester et à Glastonbury vers le milieu du siècle sous le patronage d’Henri Blois. Et c’est l’étude des chapiteaux qui nous permet de suivre les progrès et les tendances du premier art gothique en Angleterre. Les différents types de chapiteaux montrent les différentes influences qui s’exercent sur les bâtiments de chaque région dans la seconde moitié du XIIe siècle. On a supposé à juste titre que des sculpteurs français accompagnaient Guillaume Sens sur le chantier de Canterbury, où l’on voit apparaître dans la chapelle de la Trinité des chapiteaux sculptés à ornements, destinés à connaître un succès éphémère en Angleterre, mais bientôt remplacés par des chapiteaux à feuilles.
Pour mieux comprendre cette évolution, nous pouvons nous concentrer sur l’œuvre unique de Wells, sur laquelle nous reviendrons, et retracer l’évolution de la sculpture depuis les feuilles individuelles étroites de la scène du chœur, exécutées vers 1180-1185, jusqu’au feuillage plein, profondément sculpté, avec un air baroque spectaculaire, sur les chapiteaux de la nef occidentale datant du début du XIIIe siècle. Au nord, par exemple, les chapiteaux à feuillage lisse étaient en vogue et les feuillages rigides sur les chapiteaux n’y sont apparus que plus tard.
Note sur la reconnaissance de la sculpture
Pour savoir comment aborder la sculpture gothique anglaise, voir : Comment apprécier la sculpture . Pour les œuvres plus récentes, voir : Comment apprécier la sculpture moderne .
Marbre de Purbeck
Une grande partie de l’originalité de la décoration architecturale du premier gothique anglais repose sur la polychromie engendrée par l’utilisation du marbre noir de l’île de Purbeck, dans le Dorset. Dès l’époque romane, les commanditaires anglais manifestent une prédilection pour les pierres sombres, comme en témoignent les dalles funéraires taillées dans la pierre de Turne. L’exploitation du marbre de Purbeck était déjà connue dans l’architecture romane, mais la richesse du matériau se révèle vraiment dans la nouvelle construction de Canterbury, sur la plinthe du chœur, les piliers de la chapelle de la Trinité, et surtout dans les puits où la pierre a été placée verticalement. Ce marbre est devenu un élément caractéristique du premier style anglais.
Cariatides (colonnes statuaires)
Si le portail de Rochester reste un phénomène isolé, il en va de même pour les statues-colonnes de l’abbaye Sainte-Marie d’York, aujourd’hui conservées au Yorkshire Museum, dont l’analyse stylistique du traitement du visage et des plis du drapé permet de les dater de 1200-1210 par comparaison avec les sites français de Sanlis, Mantes et Sans. Les plus connues et les mieux conservées sont les figures de Jean-Baptiste et de Moïse avec le mouvement arrondi des plis de la draperie. Les treize statues existantes, dont sept en très bon état, ont été découvertes en janvier 1829 dans les ruines de l’église du monastère. Les proportions trapues de ces statues se comprennent mieux aujourd’hui si l’on accepte la théorie selon laquelle elles ne proviendraient pas du portail, mais seraient des piliers soutenant les structures élastiques de la coupole principale, elle aussi somptueusement décorée de chapiteaux feuillagés. En outre, chaque pilier aurait comporté la forme typologique d’un apôtre ou d’un prophète. Ce dispositif de portail (Bamberg), sans précédent pour une coupole, a l’avantage d’expliquer les statues et de confirmer le rôle prépondérant des coupoles dans le développement du gothique anglais.
Façade-écran
Durant la première moitié du XIIIe siècle, les grandes cathédrales anglaises en construction ou en reconstruction se voient dotées de façades ressemblant à d’immenses panneaux ornés d’une couche de sculptures. Contrairement aux façades des cathédrales françaises, l’accent était mis sur leur dimension horizontale plutôt que verticale.
Bien que la tradition anglo-normande des façades à deux tours ait persisté, certaines caractéristiques sont également dérivées des façades romanes de l’ouest de la France, avec leur riche sculpture. Contrairement à la tendance française qui privilégie les portails, l’Angleterre développe un concept plat de sculpture monumentale, où chaque élément ou statue est un élément d’une composition plus large, se fondant dans l’immense décor de la façade.
Cathédrale de Wells
Un jalon important dans l’histoire des arts plastiques de la première moitié du XIIIe siècle est la cathédrale de Wells, un édifice commencé peu après 1180 et dont la forme définitive a été donnée par la reconstruction de l’abside de Canterbury. L’avancement des travaux amena les bâtisseurs sur le front occidental dans les années 1240. L’architecture de la cathédrale de Wells, avec ses proportions gigantesques et son double transept, diffère de celle de Canterbury par son concept linéaire. L’édifice présente une élévation sur trois niveaux le long de la ligne horizontale du triforium. Avec le front occidental le plus riche de toutes les cathédrales anglaises, Wells impressionne par l’amplitude de ses niveaux horizontaux, l’augmentation de la largeur obtenue par les tours qui dépassent latéralement les nefs latérales et le nombre de sculptures qui y sont exposées. La base nue est percée de trois entrées, peu visibles entre les contreforts. Les niveaux des arcs du niveau central présentent des changements stylistiques au fur et à mesure qu’ils s’élèvent jusqu’à ce qu’ils se terminent en style perpendiculaire.
L’aspect squelettique de l’édifice est d’abord souligné par le percement des lancettes de la partie inférieure de la base. Les portails ne jouent qu’un rôle mineur dans le programme iconographique de la façade. Le portail central, dédié à la Vierge Marie, est surmonté d’une scène de couronnement. Les quadrilobes du niveau inférieur contiennent des anges et des épisodes de l’Ancien et du Nouveau Testament. Le niveau intermédiaire est couvert de statues de prophètes, de patriarches, de martyrs, de confesseurs et de divers saints locaux. Au centre de la partie supérieure, des frises superposées montrent la résurrection des morts, l’ordre des anges, les douze apôtres et le Christ en majesté qui domine tout au sommet : une vision céleste suprême, dont l’expressivité a encore été renforcée au Moyen Âge par la polychromie brillante des statues, dont on a retrouvé les traces. La construction d’un tel ensemble s’est sans doute poursuivie pendant une ou deux décennies autour de 1240 (1230-1250), comme le montre la progression stylistique des sculptures de bas en haut. Le style indique un développement autochtone qui n’ignore pas les grandes réalisations de l’époque, le front occidental de la cathédrale de Notre-Dame de Paris (1163-1345) et d’Amiens (1220-1270), et le transept sud de la cathédrale de Chartres (1194-1250).
La vue moderne ou légèrement antérieure de la façade de la cathédrale de Lincoln est d’une largeur considérable, mais avec un motif différent de celui de Wells. De hautes tours se dressent à l’arrière-plan, entourant la nef et sa façade avant, tandis que cette dernière s’élargit de part et d’autre, au-delà des bas-côtés. Cette partie de l’édifice, qui présente une haute ouverture au centre, a permis d’intégrer l’ancienne façade romane dans cette nouvelle conception, essentiellement décorative. On notera l’assemblage savant d’arcades aveugles et de baies qui font l’originalité de ce type de façade, aux proportions rendues plus hautes et plus minces par la hauteur des entrées de la façade de la cathédrale de Peterborough. A Salisbury, nous retrouvons l’équilibre général de la façade de Wells, presque moderne, avec sa traduction en une façade de proportions internes, des tours en saillie latérale et une abondance de sculptures.
Note : Pour en savoir plus sur les sculpteurs gothiques, voir : Peintres et sculpteurs médiévaux .
La sculpture gothique comme décoration intérieure : la cathédrale de Westminster
La variété des styles qui s’épanouissent en Angleterre au milieu du XIIIe siècle se manifeste surtout dans la décoration sculpturale qui orne l’intérieur des églises : écrans, sculptures architecturales et sculptures funéraires, qui occupent une place prépondérante en Angleterre. L’utilisation de marbre de Purbeck a permis d’obtenir un vernis proche du bronze (représentant le tombeau du roi John Lackland, Worcester, 1225-1235). Le style drapé à petits plis étroits et parallèles de la première moitié du siècle cède la place, vers 1270, à un dessin plus volumineux à plis souples et amples (tombeau de l’évêque Gilles de Bridport, Salisbury). Sur le plan iconographique, la principale nouveauté réside dans la représentation d’un tombeau qui n’est plus immobile mais légèrement tourné sur le côté, une main sur la hanche. Cette tendance au mouvement culmine dans la représentation des jambes croisées, caractéristique de la période suivante, sur laquelle nous reviendrons.
L’évolution de la sculpture monumentale est le résultat d’une dialectique constante entre l’apprentissage local du métier sur les sites construits et la réceptivité aux formes développées sur leurs grands homologues continentaux. La statue de femme sans tête de Winchester, diversement identifiée comme une église, une synagogue ou l’une des vertus cardinales, illustre bien ce jeu d’échanges car son caractère antique, qui révèle l’influence de Reims (Reine de Saba) ou de Chartres (porche nord), permet de la dater vers 1230-1235, en raison des analogies françaises. Bien d’autres exemples pourraient être cités, mais ils sont tous éclipsés par l’ouverture, peu après 1240, d’un chantier à Westminster où des sculpteurs d’origines diverses se réunissent à l’initiative du roi Henri III. Ils se sont réunis pour décorer l’édifice, conçu comme un reliquaire monumental et dont l’intérieur devait être richement décoré, comme une châsse traitée avec le travail d’un joaillier. Un grand nombre d’œuvres postérieures proviennent de ce grand chantier, où les mosaïstes romains ont travaillé côte à côte avec des artistes issus des cercles les plus respectés. Des éléments importants du décor sculpté ont été conservés, notamment le groupe de l’Annonciation des niches encadrant le portail intérieur de la coupole, qui pose encore de nombreux problèmes en raison des différences de style entre les deux statues, d’une part, et des différences iconographiques par rapport aux groupes français, d’autre part. L’élaboration des corps et des draperies en grands plis pendants rappelle les reines de la façade occidentale de la cathédrale de Wells et est comparable au style de certains manuscrits anglais, notamment l’Apocalypse de l’âme, enluminée peu après dans le cercle du palais et de l’abbaye de Westminster. L’influence de ces sculptures, associées à une commande achevée en 1253, a même atteint la Scandinavie, comme le montre le Saint Michel terrassant le Dragon au musée de Trondheim, en Norvège.
Westminster voit également naître le concept plastique, devenu caractéristique de la sculpture anglaise, qui consiste à placer de grandes figures sculpturales dans des arcs à l’intérieur des bâtiments. À partir de cette époque, les anges envahissent les parties supérieures de l’église gothique et incarnent l’idée de la basilique comme représentation du paradis. Ceux qui ornent le triforium du transept de Westminster (vers 1250-1259) ressemblent au groupe de l’Annonciation par le traitement des corps et des draperies, mais leur sourire timide et la structure de leur visage trahissent la connaissance des innovations rémoises ou répondent à des tendances internationales parallèles. L’artiste qui a sculpté ces chefs-d’œuvre a probablement participé au traitement des trois pierres maîtresses de la salle des archives, les sculptures de la suite ouest de l’arcade de la chapelle Saint-Paul, de la rainure au milieu de l’arcade de la chapelle Saint-Édouard et de la pierre angulaire de l’Annonciation. La base du triforium absidal, qui représente un homme riant, parfois identifiée comme un portrait du premier architecte cité, Henri de Raine (1244-1256), peut également lui être attribuée. Elle est le résultat d’une remarquable richesse de style, caractérisée par la vigueur du traitement, la manière dont les corps se détachent sur le fond, bien que la tâche du sculpteur n’ait pas été facile dans le cas de la position en arc de la sculpture. Des fragments de l’arcade murale de la chapelle Saint-Jean-Baptiste illustrent encore, au milieu du siècle, l’ambition artistique qui préside à l’introduction d’un programme iconographique qui apparaît déjà dans la chapelle de la Vierge peu après 1220.
L’importance de la sculpture gothique anglaise
Ces tendances artistiques apparues dans le cadre royal montrent que l’importance de la sculpture anglaise du XIIIe siècle est trop souvent sous-estimée. Les fragments découverts confirment la qualité des sculptures de la nef de la cathédrale de Gloucester et de la tête du palais de Clarendon, conservée à Salisbury. Au cours des vingt années qui suivent le milieu du siècle, l’influence de Westminster atteint le portail du Jugement dernier de la cathédrale de Lincoln, dont la sculpture, en particulier les statues des piles d’appui, est illustrée par le modelé et le traitement gracieux des draperies. Le second ensemble, le célèbre chœur d’anges de Lincoln, dont les travaux commencèrent en 1250 et qui fut consacré en 1280, rassemble les fruits de tout cet héritage et annonce les voies nouvelles du dernier tiers du siècle déjà visibles dans Virtues and Vices de la salle principale de Salisbury et surtout dans Christ in Majesty de l’abbaye de Rievaulx, ou encore dans Angels from Sawley (Derbyshire).
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